Frédérique HUPIN

  • Frederic Vanwindekens, inventeur du quanti-slake-test, au festival de l'agroécologie et de l'agriculture de conservation des sols à Fexhe (Belgique)
11
décembre
2021

Le point sur la capture du carbone par les technologies de la chimie (part I)

A l’heure où les champs en ACS sont regardés avec envie par les certificateurs carbone, il me paraissait intéressant de prendre du recul et d’aller voir ce qu’il se passe dans la chambre à côté, celle des technologies de la chimie.

L’association des anciens de la faculté d’agronomie dont je suis issue organisait une conférence pour faire le point sur les technologies de capture et de transformation du CO2. Dans le jargon des ingénieurs chimistes, dites CCU (CO2 Capture & Utilization).

Cette conférence rassemblait plusieurs intervenant décrits dans l’invitation à la conférence.

La conférence complète peut être revisionnée ici.

Les diaporamas des exposés sont ici.

Je vous résume ici les grandes lignes de cette conférence.

1ère intervenante : La professeure Patricia Luis Alconero

La professeure Patricia Luis Alconero travaille sur la capture du CO2 depuis de nombreuses années. Elle est ingénieure chimiste en « material and process » et donne cours à l’UCLouvain en Belgique.

Patricia Luis Alconero

"Le CO2 est une molécule merveilleuse, elle nourrit les plantes MAIS elle est très oxydée. Elle est au niveau maximum de l’oxydation du carbone. Vous ne pouvez pas revenir vers quelque chose de moins oxydé sans apporter de l’énergie. C’est ça le nœud du problème !"

Avant de poursuivre

Une réaction d’oxydoréduction ou réaction redox est une réaction chimique au cours de laquelle se produit un transfert d’électrons. L’espèce chimique qui capte les électrons est appelée « oxydant » et celle qui les cède, « réducteur ».
Dans le cas de la combustion d’une molécule organique, l’oxydant est l’oxygène. La réaction se fait dans le sens :
Hydrocarbure + Oxygène —> CO2 + H2O avec dégagement de chaleur. Le carbone contenu dans l’hydrocarbure est oxydé à son maximum, la molécule a perdu tous les électrons qu’elle pouvait perdre et s’est transformée en CO2, forme la plus oxydée qu’il soit. Il n’y a plus d’énergie à en tirer.

Retour à la conférence

L’ objectif : comment réduire la quantité d’énergie nécessaire pour ramener le CO2 à une forme mois oxydée.
1ère étape : le capturer. Puis une fois qu’on a du CO2 pur, on en fait ce que l’on veut : le séquestrer, le réutiliser.

Pour capturer le CO2, on utilise des colonnes et un liquide absorbant : le MEA (monoéthanolamine). Ce solvant doit être produit … Comment ? A partir d’ammoniac et d’oxyde d’éthylène, eux-mêmes produits à partir de méthane et d’éthylène. Tout cela requiert de l’énergie et génère des émissions directes et indirectes de CO2...

Colonne de capture du CO2 - Patricia Luis

C’est à ce moment- là que je suis contente d’avoir choisi la branche ingénieur agronome, plutôt qu’ingénieur chimiste … C’est tellement plus simple dans la nature (question de point de vue bien sûr 😉)

Production de MEA - Patricia Luis

L’exposé continue de la même manière (des flèches et des formules chimiques) en montrant finalement qu’il n’y a pas de baguette magique pour capturer le CO2.

Cette chercheuse et professeure en chimie n’est pas dupe et ne pratique pas la langue de bois. Elle remet les pendules à l’heure de certains fans d’innovations qui pensent qu’on va pouvoir continuer de vivre comme aujourd’hui et résoudre les problèmes grâce à la technologie.

Elle conclut : "même si on réussissait à capturer le CO2 sans relarguer de CO2 ou même si on réussissait un tel procédé en émettant moins de CO2 que la quantité capturée … nous n’aurions pas encore résolu le problème actuel du changement climatique !"

Pour ne pas terminer sur une note si pessimiste, elle projette sa vision : "les avancées technologiques ne sont pas une solution suffisante. Elles doivent être accompagnées d’une transformation sociale. On doit passer du concept (déjà nouveau) d’économie circulaire à celui de société circulaire."

2ème intervenant : Le professeur Damien Debecker

La suite dans un prochain article 😉

Mais déjà un petit avant goût avec une citation de Damien Debecker pour comprendre si on est vraiment occupé à transformer un déchet en carburant :
"Ce serait comme si j’avais inventé un procédé qui transforme des boues en jus de pomme mais sans trop insister sur le fait que pour cela je dois utiliser du Petrus de 20 ans d’âge…
Donc soyons honnêtes, appelons cela de la conversion de CO2 et pas du recyclage de CO2."

Extrait conférence Damien Debecker


11
octobre
2021

La communication comme solution

Un agriculteur dessine des crop circles dans son champ de couverts et attire plus de 650 personnes !

Un mouton en crop circle
Crédits : Frederique Hupin

Une belle action de communication créée par des agriculteurs en plein coeur d’un couvert multi-espèces.

Cet événement fut d’abord annoncé en douce par un coeur géant planté en plein champ : bordé de tournesols et rempli de phacélies, sursemé dans un couvert multi-espèces.

La presse s’empare du sujet. Un reportage sur la TV régionale fait suite à la publication d’un article dans un journal grand public :
http://frederiquejournaliste.blogspot.com/2021/10/la-communication-comme-solution.html

Le point d’orgue : le parcours d’un jour était en forme de mouton !
Cette journée ensoleillée aura attiré plus de 650 visiteurs.
Les agriculteurs voisins étaient de la partie pour guider les citoyens au sein du parcours semé de stands explicatifs sur toutes les mesures adoptées par les agriculteurs pour améliorer l’environnement. De nombreux organismes de vulgarisation et de conseil agricoles n’ont pas hésité à mettre la main à la pâte : Greenotec, Protecteau, Natagriwal, Faune et biotopes, le contrat de rivière Dyle-Gette, Staphyt, le GAL Culturalité. L’Agence de Développement Local de la commune (ADL Perwez) a joué son rôle de créateur de liens et de partenariats au sein de son territoire en acceptant de coordonner l’action dès son imagination par les agriculteurs.

Quand tout le monde connaît son ADN et agit en fonction de celui-ci, ça ne peut que produire des actions win-win-win. En biologie, on appelle cela des symbioses :-)

Ajoutons donc à l’ADN des agriculteurs la communication.

Un coeur en couverts végétaux
Crédits : Frederique Hupin

Dessine-moi un mouton

ou les coulisses de la conception des "crop circles".

Prouesse numéro 1 : semer un coeur parfait.
Pour cela, l’agriculteur s’est fait aidé d’un infographiste (de l’Atelier infographik) qui a dessiné le coeur sur son logiciel et lui a donné les mesures à tracer sur le terrain. Parcourir le champ avec son décamètre, planter 90 jalons, les suivre au semoir, puis attendre que ça pousse !

Prouesse numéro 2 : tondre le couvert et créer un mouton vu du ciel.
Le graphiste et pilote de drone professionnel (chez Drone Media Services) a créé le dessin du mouton en une seule ligne avec la contrainte supplémentaire de la longueur du parcours qui devait faire environ 800 m. Il l’a ensuite implémenté dans un programme GPS pour drône acheté spécialement pour l’occasion (ce genre de prouesse n’étant pas incluse de base dans le drone semi-professionnel utilisé). C’est enfin le drône qui a parcouru le chemin tracé par les 99 points GPS (waypoints) tout en étant suivi par le tracteur qui broyait le couvert sur son passage. Contrainte supplémentaire pour le drône : réaliser le parcours en restant à une altitude de 8m au-dessus du champ et à une vitesse constante de 8 km/h.
"Une petite journée de boulot, mine de rien ..." nous explique Antoine Dewaele, le créateur graphiste. Fils d’agriculteur, il n’a pas hésité à se lancer dans l’aventure et à apporter sa contribution pour recréer du lien entre l’agriculture et les citoyens.


28
juin
2021

Un nouveau guide pour se lancer dans l’ACS

Le site Pleinchamp.com vient de publier en ligne un guide "Se lancer en agriculture de conservation des sols".

Guide Pleinchamp.com : selancer en agriculture de conservation des sols
Pleinchamp.com se définit comme le site expert des professionnels agricoles. Vous y trouverez des actualités ("fil de l’actualité"), les "cours et marchés", une base de données documentaires, une météo. A la base, Pleinchamp.com est la propriété de la Caisse nationale du Crédit Agricole.

Ils créent des guides afin d’accompagner les agriculteurs dans leurs projets d’installation, de gestion d’exploitation ou de transition agricole. C’est ce dernier point qui nous intéresse. Dans ce cadre ils viennent de créer un guide spécifique à l’ACS : "Se lancer en agriculture de conservation des sols".

Les sujets sont bien résumés, bien découpés, bien illustrés. Les contenus sont amenés par des témoignages d’agriculteurs, de professionnels, sous forme de textes ou de vidéos.

Pour le télécharger, il faut être abonné au site (10 € par mois) mais le guide peut également être consulté gratuitement en ligne.


23
avril
2021

Faites labour, pas la guerre !

Parce-que pratiquer l’AC c’est avant tout être inclusif, ouvert à toute forme d’agriculture, essayer de comprendre l’autre plutôt que de le combattre, et profiter de toute opportunité pour apprendre.

Pour toutes ces raisons, j’ai accepté l’invitation d’un agriculteur à monter sur le tracteur pour labourer son superbe champ de couverts multi-espèces. Tournesol, phacélie, avoine, radis chinois, vesce, trèfles, ... tout ça labouré, sous mes fesses un 30 novembre.
Je decends du tracteur, plonge ma main dans le sol tout frais labouré. Ca sent bon l’humus, c’est rempli de radicelles, un ver de terre pointe sa tête.
C’était le premier acte.

Le deuxième acte ? Lagriculteur me propose de participer au semis des betteraves sur cette même terre. Le 30 mars. 4 mois jour pour jour après le labour. Il prend alors son temps (oh combien précieux) de m’expliquer l’importance de l’émiettement de la terre pour que la betterave puisse grandir au mieux de sa forme.

Le troisième acte fut le passage sur la parcelle de son voisin, converti à l’AC depuis 3 ans, se demandant comment il allait pouvoir semer ses betteraves dans sa terre jonchée des débris de son couvert végétal.

Future terre à betterave
Crédits : Arnaud Ghys


De ces échanges est sorti une pleine page mise à la Une d’un journal grand public bien diffusé dans les campagnes.
Je vous le livre ici, avec un clin d’oeil au monde du théâtre qui doit se taire en ce moment et qui pourrait gagner un nouvel acteur en la personne de certains agriculteurs ;-)
L'Avenir BW - Labour or not labour
Article complet paru dans L’Avenir le 1er avril 2021 : http://frederiquejournaliste.blogspot.com/2021/04/semer-chacun-sa-technique.html


18
décembre
2020

Séquestrer du carbone à la ferme : opportunités, freins.

Un agriculteur est interviewé dans un journal européen à tendance écologique et pourtant il n’est pas bio, il ne fait pas de circuits courts, il ne vend rien à la ferme. Mais que fait il donc de si intéressant ? Et comment s’y prend-t-il ? La réponse dans cet article. Avec également sa vision du système, ce qu’il veut faire, ce qu’il ne veut pas faire, les verrous économiques, les freins au changement.
Le tout appuyé par le discours scientifique de Claire Chenu de l’INRAE au travers du nouveau projet de recherche européen dont elle est la coordinatrice (EJP-Soil).

Lire l’article

Extrait du Green European Journal


22
octobre
2020

Quand les agriculteurs plantent des fleurs, les citoyens débarquent dans les champs

Une belle initiative d’un agriculteur qui a ouvert sa parcelle de couverts de 20 hectares au grand public le temps d’un après-midi.

Des moutons dans les champs Explications au champ, moutons, miscanthus, produits fermiers. Tous les ingrédients étaient réunis. Même un fond d’éoliennes en guise d’image d’innovation et d’environnement.
Cet agriculteur (Benoît Lempereur) n’a pas fait cela tout seul, il s’est entouré et son initiative a finalement fédéré les agriculteurs de sa commune, des associations de conseil en agri-environnement et des chercheurs.
Malgré la COVID et le temps frais, 200 personnes ont foulé les tournesols.
Un événement pareil, ça attire d’office la presse. La télévision locale s’est déplacée ainsi qu’une journaliste spécialisée agri-envi (c’est moi ;-) ).
Je vous relate cet événement dans la presse :
http://frederiquejournaliste.blogspot.com/2020/10/les-fleurs-des-champs-ont-la-cote.html

Mon seul regret, cette parcelle va être labourée dès que la législation le permet (le 15 novembre).
Allez Benoît, encore une bière (belge et avec de l’orge local) ?