Contributions

  • Semis de maïs en Sologne fin avril 2023
  • Pieds d'érables dans une parcelle cultivée
  • Yannick Bestaven dans La France Agricole
  • Parcelle d'essai de CIVEs
  • Plot à alouettes
21
juin
2022

Les plots à alouettes... mais qu’est-ce que c’est ?

En Belgique, le projet Agriculture & Biodiversité est financé par le fonds européen LEADER. Lancé en 2017, il vise à restaurer une capacité d’accueil du milieu agricole pour la petite faune des plaines, fortement en déclin. Pour y parvenir, le projet fait appel aux agriculteurs particulièrement motivés par le désir de développer des pratiques culturales plus favorables à l’environnement. Un travail important est effectué sur les couvertures hivernales, mais aussi sur l’installation des mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC), l’utilisation de barres d’effarouchement, ou encore l’installation de plots à Alouettes des champs.

Plots à alouettes en vue aérienne
Plots à alouettes en vue aérienne
Plot à alouettes
Plot à alouettes

Les plots à Alouettes sont des petites parcelles de terre nue de 15 à 25 m² que l’agriculteur réalise lors du semis des céréales en relevant le semoir sur quelques mètres. Ils servent de pistes d’atterrissage qui facilitent l’accès à la terre dans les grandes parcelles de céréales (> 4 ha) pour les Alouettes des champs et les Bergeronnettes printanières. Ces oiseaux prospectent les plots pour y trouver des graines et prédater des insectes, mais aussi pour entrer plus facilement dans la culture et réaliser le nid. Selon des études européennes [1], les plots à Alouettes améliorent significativement le succès reproducteur de l’espèce. Pour arriver à ce succès, il faut avoir deux à trois plots à Alouettes par hectare. Au niveau du salissement, les plots sont désherbés de manière classique, ce qui évite la colonisation par les adventices, excepté après la culture de chicorée qui laisse plus souvent des repousses et où l’attention devra être soutenue. Idéalement, les plots doivent être réalisés à plus de 200 mètres des éléments verticaux (arbres, haies, poteaux, etc.) pour éviter la prédation par les corvidés et en-dehors des lignes de pulvérisation que le renard apprécie beaucoup.

Alouette des champs dans un plot
Alouette des champs dans un plot
Bergeronnette printanière dans un plot à alouettes
Bergeronnette printanière dans un plot à alouettes

Si vous voulez en savoir plus sur le projet Agriculture & Biodiversité, un article écrit par Hadrien Gaullet, Parc naturel Burdinale-Mehaigne, en parle dans le numéro de TCS de cet été, le 118 de juin/juillet/août 2022 à paraître fin juillet.

Voici également une fiche détaillée des plots à alouettes...
Fiche plots à alouettes

(1) Effect of Sky Lark plots and additional tramlines on territory densities of the Sky Lark Alauda arvensis in an intensively managed agricultural landscape Jan-Uwe Schmidt, Alexander Eilers, Madlen Schimkat, Jonas Krause-Heiber, Andreas Timm, Winfried Nachtigall & Arno Kleber
Skylark( Alauda arvensis) utilisation of micro-habitats in spring barley fields Peter Odderska r a, *, Allan Prang a, John Grynderup Poulsen b, Per Normark Andersen c, Niels Elrnegaard


4
octobre
2021

Quand A2C mise sur le bon cheval : marin et terrien

Yannick Bestaven dans La France Agricole Nous avions misé sur le bon cheval dans notre article "Entre mer et terre : deux mondes qui ont plus de similitudes que l’on croirait !".

"J’ai appris à conduire sur un tracteur" raconte Yannick Bestaven à La France agricole.

La France agricole qui publie un long article sur ce marin français de retour vainqueur de la course mythique autour du monde à la voile en solitaire : le Vendée Globe.

Marin mais pas que. Un bon terrien avant tout. Epicurien, modeste, inventeur qui partage énormément de valeurs communes avec le monde agricole.
"De la même façon qu’un skipper, on ne devient pas agriculteur par hasard. C’est une passion."

Et comme si c’était dessiné d’avance, son sponsor est un vendeur de poulets ! #Maîtrecoq

"Pourquoi dit-on de vous que vous êtes autant un homme de la mer que un homme de terroir ?"
"Quand j’étais jeune, mes parents m’envoyaient à la ferme chez mon oncle ... Je le voyais bosser de 5h à 21h ... Il a été un modèle pour moi".
La suite sur le site de La France Agricole.


18
janvier
2021

L’influence des aménagements écologiques sur les communautés de carabe en milieu agricole intensif

Les haies, les bandes fleuries annuelles et les bandes enherbées permanentes permettent-elles de favoriser la diversité et l’abondance des carabes, dans le but de promouvoir la régulation des ravageurs et le contrôle des adventices ?
Sur 3 sites en Belgique, Emilie et son équipe ont piégé des carabes dans ces aménagements écologiques et dans la culture de céréale adjacente.
Les résultats ? Plus de 7400 individus répartis dans 41 espèces ! Les grandes espèces prédatrices dominent les échantillons, et ce sont elles qui s’aventurent le plus loin des bordures de champ. Les bandes fleuries favorisent les espèces granivores… mais celles-ci ne se hasardent pas loin dans la culture. Étonnamment, les haies présentent moins de diversité et d’abondance en carabes et privilégient les petites espèces.

Similarités des assemblages de carabes selon l'aménagement écologique et la culture
Similarités des assemblages de carabes selon l’aménagement écologique et la culture
C2 et C30 : 2 ou 30 m dans la parcelle ; A : bande fleurie annuelle ; G : bande enherbée ; H : haie.

Ce qu’il faut retenir pour favoriser ces auxiliaires :
La diversification des bordures de champs offre aux carabes granivores un habitat et des ressources nutritives variées et étalées sur la saison, tout en offrant aux carabes prédateurs un abri lors des perturbations de la zone cultivée ;
Les aménagements des bords de champs doivent se penser à l’échelle du paysage, grâce à la concertation entre agriculteurs. Des haies isolées n’auront que peu d’effets positifs sur les auxiliaires si elles ne sont pas interconnectées dans un maillage écologique cohérent.

Pour plus d’informations (article en anglais disponible sur demande) : Pecheur E, Piqueray J, Monty A, Dufrêne M, Mahy G. 2020. The influence of ecological infrastructures adjacent to crops on their carabid assemblages in intensive agroecosystems. PeerJ 8:e8094


12
janvier
2021

Entre mer et terre : deux mondes qui ont plus de similitudes que l’on croirait !

Le parcours du Vendée Globe
Le Vendée Globe a démarré le dimanche 8 novembre. Trente trois marins parmi les plus compétents (pour ne pas dire fêlés) au monde sont partis pour un tour du monde en solitaire et sans escale. Alors que les concurrents du Vendée Globe, l’Everest des mers, franchissent le cap de 2 mois de course en solitaire, une 9ème édition qui n’aura épargné personne avec des mers du sud déchaînées, leurs engagements et leurs performances nous forcent à l’admiration. Cet événement que deux d’entre nous suivent de très près génère quelques réflexions et comparaisons avec l’agriculture, et dans notre cas, avec l’agriculture de conservation des sols (ACS), que nous souhaitions partager avec vous.

  1. Cette aventure n’est pas pour les rêveurs, les utopistes ni même pour les donneurs de leçons. Il faut avant tout être bon marin pour s’aligner sur la ligne de départ et surtout tenir les 70 à 90 jours de mer. S’installer en agriculture et mener un projet est assez similaire : la route est longue et semée d’embûches, il faut être prêt à tenir la distance.
  2. Ces marins sont aussi de formidables chefs d’entreprise. Il faut se vendre, trouver des sponsors, gérer un budget, rassembler, gérer et animer une équipe avec des compétences diverses. Comme ailleurs, si l’argent peut aider, la réussite n’est pas qu’une question de budget ni même d’expérience comme ça été le cas pour Alex Thomson (Hugo Boss), contraint d’abandonner avant le premier cap. C’est la cohérence d’ensemble qui est la clé avec la détermination de tous. Entreprendre est aussi une forme de compétition où il faut aborder l’épreuve avec un mental de gagnant, aller chercher tous les détails et ne rien lâcher !
  3. Ces marins sont aussi de très bons communicants. Leur impact médiatique conditionne leur sponsoring, leur reconnaissance et même leur carrière. un excellent navigateur qui ne peut pas gérer une entreprise et savoir transmettre de l’émotion, de l’envie et du rêve aura ici des difficultés. C’est certainement un élément trop oublié en agriculture, trop confiants que nous sommes dans l’existence de la demande et l’assurance de la correspondance de nos produits ! La communication est une dimension, comme pour ces marins de course au large, que les agriculteurs doivent investir !
  4. Ils sont aussi des génies « bricoleurs » et réparateurs. Seul, avec les conseils de spécialistes à terre, il faut conserver le bateau en ordre de marche, de la coque aux voiles en passant par l’équipement et l’électronique de bord. Si ce n’est pas la ficelle bleue et le fil de fer mais la résine et la fibre de carbone, ils se transforment souvent en MacGyver pour gérer, en solitaire, et dans des conditions météorologiques parfois dantesques, le bon état de fonctionnalité du bateau.
  5. Même si le cap est clair, rallier les Sables d’Olonne en passant par les 3 caps (Espérance, Leeuwin et Horn), la route n’est pas droite et elle est semée d’embûches. Chacun ajuste les voiles et son parcours en fonction des conditions de mer et surtout de vent. Il se peut même qu’il soit plus intéressant de faire un détour, de rallonger voir même de ralentir que de filer droit. Beaucoup de stratégie et de météo. Et oui ces marins ont constamment les yeux tournés vers le ciel, comme les agriculteurs, et échafaudent des hypothèses climatiques afin de faire leur choix. Même en agriculture il faut accepter de faire le dos rond ou de tirer des bords quelques fois !
  6. L’endurance et un mental d’acier sont des caractères clés pour ces marins d’exception. Changer la voilure, régler le cap, courber le dos pour mieux repartir sans certitude du lendemain, se réjouir simplement d’une belle glissade, d’un couché de soleil, d’un vol d’albatros ou croiser des baleines sont leur lot quotidien. Semer et ressemer avec une météo aussi incertaine que les prix sans compter les attaques de ravageurs exigent, d’une certaine manière, la même détermination et fournit les mêmes petits de moments de bonheur qu’il faut savoir apprécier. Comme en voile, les réussites sont très appréciables lorsqu’elles se présentent mais ce sont les difficultés traversées qui amplifient le plaisir !
  7. La course au large a ceci de puissant et d’épuisant qu’elle génère dans la compétition un sillage chargé d’émotions multiples mais aussi des déceptions et des sentiments d’injustice. Dans les faits, le Vendée Globe, peut punir sans états d’âme les marins pour une mauvaise rencontre, pour une pièce trop neuve ou trop usée, pour un choix météo hasardeux ou pour un coup de vent mal orienté. Entre la fiabilité du bateau et la rudesse de la mer, il faut accepter les contrariétés et gérer les petits soucis, les gros pépins et même quelque fois se résoudre à jeter l’éponge. Même si le facteur « chance » peut jouer, ce sont souvent ceux qui sont devant qui profitent des meilleurs vents et systèmes météos. En voile, comme dans toute entreprise et en agriculture, ce sont ceux qui s’engagent et avancent qui sortent souvent en tête du peloton !
  8. Enfin beaucoup d’agriculteurs peuvent partager le même sentiment de solitude que ces marins, seuls le matin de bonne heure dans ses champs ou à la traite des vaches le jour de Noël. Décalés du monde, pendant que les autres festoient, se reposent ou sont en vacances, ils s’affairent. Cette solitude est, certainement, plus importante quand elle s’associe souvent au sentiment d’incompréhension. Ce serait sympa de redevenir à nouveau des « héros » du quotidien !

Gérer une ferme, mettre en œuvre l’ACS, affronter des difficultés, des critiques et une certaine solitude rapproche en fait assez bien ces marins de la course au large avec les agriculteurs et surtout avec les ACistes. Si pour les premiers l’effort, l’abnégation et les sentiments sont certainement beaucoup plus intenses, les agriculteurs doivent par contre tenir dans la durée. Échangez avec ces marins vous verrez et serez surpris ; et ils vous comprendront !

Frédéric THOMAS et Frédérique HUPIN, un agriculteur et une skippeuse qui se comprennent

Pour les suivre : site officiel du Vendée Globe.
Notre chouchou : le Rochelais Yannick Bestaven.

Yannick Bestaven passe le Cap Horn en tête
Yannick Bestaven passe le Cap Horn en tête
Crédits : Yannick Bestaven / Maître CoQ

28
février
2020

Le cycle du ver de terre est au cœur du rajeunissement des sols

JPEG - 148.1 koLe cycle du ver de terre est à l’image du cycle de l’eau, un mouvement de rajeunissement permanent des sols ; raison pour laquelle le sol est une ressource non renouvelable qui s’épuise.
Mais entendons-nous bien, un sol est une ressource non renouvelable à l’échelle humaine ; et qui s’épuise uniquement si l’on s’en sert. Et s’en servir, c’est y puiser ses ressources nutritives comme on emprunte, pompe ou tire l’eau d’un puits.
Excepté le forestier qui les puise à d’autres fins que l’alimentation, ou le producteur d’agrocarburant, de coton ou de chanvre, l’agriculteur-e les puise via les plantes qu’il cultive, le pêcheur-e les puise des océans sous forme de poissons, le chasseur-e sous forme animale, le cueilleur-e sous forme végétal, etc.

Renouvelable : qui se renouvelle, qui se reconstitue, qui revient de nouveau

Le cycle de l’eau illustre parfaitement l’idée d’une ressource renouvelable qui se refait une santé à l’échelle humaine. Idem pour l’air qui se rajeunit en permanence pour nourrir nos cellules en oxygène, l’azote pour épauler le métabolisme de la cellule végétale, ou le phosphore pour la photosynthèse.
Même l’alternance du jour et de la nuit peut être vue comme un cycle de renouvellement à l’image du cycle gazeux des végétaux et des animaux. En effet, quand nous, les animaux, rejetons du C02, les plantes s’en nourrissent. Inversement quand elles rejettent de l’oxygène ; l’oxygène étant un déchet du processus biochimique de la photosynthèse. Lors de cette réaction avec l’énergie solaire, la plante utilise les deux hydrogènes H20 pour synthétiser ses hydrates de carbone et rejeter l’atome d’oxygène : “Des expériences de marquage radioactif ont montré que cet oxygène provient de l’eau, et non du CO2 absorbé.” Bref, chacun se nourrit des déchets de l’autre !

- Problème, nous rejetons aujourd’hui plus de CO2 que les plantes peuvent en avaler, ce qui déséquilibre le système.
- Problème, la majorité de notre oxygène provient des océans et ils sont en train de se plastifier !
- Problème, notre corps meurt en moins d’une minute s’il n’est pas nourri en oxygène… Sans être médecin, j’ai un peu le sentiment que l’oxygène est une ressource précieuse requise à notre bonne santé 🙂

Quant au ver de terre, il est la figure de proue du système qui rajeunit sans cesse les sols

Plus précisément, certaines espèces de vers de terre sont la figure de ce système nourricier. Et de fil en aiguille, on peut soutenir que le futur de notre alimentation dépend de leur avenir ; un avenir qui dépend de son alimentation ; une alimentation qui dépend de ce que nous leur donnons à manger !
Ceci dit, l’important reste le système, un système nourricier constitué d’une infinitude de bestioles qui partagent d’être cellulaires. Et si nous devions comparer ce système à une roue de vélo, le ver de terre n’en serait que le moyeu.

Rajeunir

Remettre à neuf ou à jeune un sol peut surprendre, mais l’idée portée par ce verbe semble le mieux définir qu’un sol cultivé est comme un feu, ni vieux, ni jeune, il est, ou il est éteint. En revanche, il ne se recharge pas par le cul comme un poêle à bois, mais par le dessus. Tout ça reste logique, on mange bien par la bouche, raison pour laquelle nos papilles gustatives sont implantées dans cet orifice plutôt que dans l’anus. Idem pour le lombric terrestre, il s’alimente par sa bouche d’entrée et non par sa bouche de sortie.
Toutefois, c’est bien avec cette dernière bouche qu’il rajeunit les sols ! En les engraissant et en remontant sans cesse à la surface du sol une terre enrichie via ses cacas. Et dans un sol bien habité, ils en chient tout de même 1/2 cm par an sur toute la surface. (Charles Darwin avait observé sur une durée de 30 ans, que les vers de terre avaient produit 15 cm de sol nouveau.)
Mais ne nous trompons pas, un sol vivant ne veut pas dire qu’il est vivant, seulement habité ! Comme une maison animée, ce n’est pas la maison qui fait l’animation…

Extrait de la suite de l’Éloge du ver de terre à paraître fin 2020. Christophe Gatineau, agronome, cultivateur et auteur chez Flammarion de l’Éloge du ver de terre (2018) et de l’Éloge de l’abeille (2019), rédacteur du blog www.lejardinvivant.fr

Et un lien pour lire la suite de cet article


28
octobre
2019

Plus de renards = moins de pesticides

Quelle drôle d’idée, se diront les chasseurs, penser que notre bête noire est un acteur incontournable de l’agriculture durable au même titre que l’abeille et le ver de terre.
Mais voilà, notre renard roux a beau appartenir à une communauté d’auxiliaires sur laquelle l’agriculteur peut s’appuyer pour produire une alimentation plus saine et écologique, les parlementaires en ont décidé autrement, confiant aux chasseurs le soin de s’en débarrasser. Une loi les encourage même à rendre ce service public sans consulter le propriétaire des lieux : “Le renard (Vulpes vulpes) peut toute l’année être : piégé en tout lieu…” Arrêté du 3 juillet 2019 pris pour l’application de l’article R. 427-6 du code de l’environnement.
Bienvenue à la campagne, ce vaste terrain de jeu pour le troisième sport national en termes de licenciés, la chasse, le sport le plus détesté des Français. Mais ce n’est pas le sujet. Ici, les gens n’ont pas la haine de la chasse mais d’une certaine chasse. Alors pourquoi le renard, l’un des animaux sauvages préféré des Français, est-il autant détesté du gouvernement, des parlementaires, et de leurs bras droits, les chasseurs ? Au point de l’avoir classé nuisible. Nuisible pour la société.
Incompréhensible à l’heure où l’État cherche à faire des économies, un renard pouvant rapporter gros à la société, très gros, jusqu’à 2.400 euros par tête de pipe ! Explication.

Parlons chiffres !

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Ce chiffre a été avancé par le docteur en éco-éthologie et en ethnozoologie Denis Richard Blackbourn lors d’un colloque sur le renard organisé par l’Association pour la protection des animaux sauvages (Aspas) qui s’est déroulé à Paris au mois de mai 2017. Et avant de l’avancer, il a pris toutes les précautions d’usage.
Pour faire simple, en agriculture, les animaux végétariens se nourrissent des cultures quand les animaux carnivores ou omnivores se nourrissent de leurs collègues végétariens... Et, à la louche, un végétarien consomme entre 50 et 100 % de son poids tous les jours. Plus il pèse lourd, plus il consomme, à l’exemple du campagnol terrestre, autrement appelé rat taupier, Arvicola terrestris, un petit rat végétarien qui mange jusqu’à 50 kg de végétaux par an…
On saisit immédiatement l’impact sur les rendements, d’autant que notre petit rat a également un bel appétit sexuel avec un taux de reproduction de 1 à 50, un couple pouvant mettre au monde plus de 100 individus par an… Qui, eux-mêmes, peuvent faire naître 5.000 nouvelles têtes l’année suivante. Et ainsi de suite. On imagine donc aisément les potentiels dégâts occasionnés aux cultures si les populations ne sont pas régulées par une communauté de prédateurs qui, dans les grandes lignes, va de la couleuvre au rapace via le renard.
Le docteur Blackbourn a rappelé que d’autres espèces sont moins gourmandes, comme le campagnol des champs, Microtus arvalis (8,5 kg de végétaux consommés par an), ou le campagnol agreste, Microtus agrestis, (11 kg par an). En métropole, sur les treize espèces de campagnol recensées, trois s’intéressent particulièrement aux cultures et une est protégée. Cette dernière est aquatique et elle ne s’attaque pas aux cultures.

Le renard, un protecteur des cultures

Avec ses déserts verts où rien ne pousse en dehors des variétés cultivées, l’agriculture moderne favorise ces communautés végétariennes au détriment des communautés qui s’en nourrissent. Par l’absence de diversités végétales, de haies, de bois ou de forêts, la monoculture donne ainsi un avantage considérable aux rongeurs. Idem pour les couvertures végétales permanentes ou l’absence de labour, des techniques d’agriculture durable.
La radicalité du climat concentre également tous les problèmes, comme cette année, où la prédation sur les cultures a été amplifiée avec la sécheresse. En effet, tous les animaux aiment et recherchent le sucre dans la nature (même les vers de terre), et les cultures sont des milieux très riches en douceurs. Au mois de septembre dernier, nous avons même trouvé des campagnols en haut des troncs de maïs doux, en train de dévorer les fusées…
Alors, en l’absence d’une communauté de prédateurs suffisante, quelles sont les solutions à disposition de l’agriculteur pour ne pas mettre en péril ses récoltes ?

À petite échelle, dans un jardin, on peut facilement les piéger avec des tapettes à souris contrairement à une exploitation agricole où les solutions sont moins tempérées. Mécanique, avec la charrue qui va bouleverser leur habitat et donc réduire leur développement. Chimique avec l’épandage d’appâts ou de grains empoisonnés, qui, une fois ingurgités par les campagnols, contribueront à empoisonner leurs prédateurs… Une chaîne sans fin. En bio, on utilise du tourteau de ricin pour les empoisonner. Un produit biodégradable qui va également empoisonner toute la chaîne alimentaire avant de se dégrader.
À partir de données scientifiques liées à leurs contenus stomacaux, le docteur Blackbourn a déterminé que 80 % de l’alimentation des renards était constituée de petits rongeurs. 145 kg, soit 3.000 têtes, parfois le double ou le triple selon les circonstances écologiques, c’est la consommation moyenne d’un renard sur les 180 kg de nourriture qu’il ingurgite tous les ans. Et outre l’économie de temps et d’argent, le service agronomique rendu par un renard à l’agriculteur peut être estimé à 2.400 euros. 2.400 euros de dégâts économisés.
Et enfin, le renard est un chasseur de haut vol, pouvant capturer jusqu’à 20 campagnols par jour, mais aussi jusqu’à 4 lombrics terrestres par minute ! Extrait de l’Éloge du ver de terre :
« Le ver de terre voit d’un bon œil le renard se faire une poule. Pour la bonne raison que la poule est l’un de ses redoutables prédateurs, raison pour laquelle elle n’a rien à faire dans un jardin. Mais de savoir que le renard comme la poule sont des omnivores opportunistes ne le rassure pas beaucoup quant à un avenir radieux ! Un renard qui, faute de poule, se remplira le ventre de sa rencontre inopportune avec un ver de terre paisiblement en train de brouter comme une vache ! Quant à goupil, considéré comme un nuisible par la législation française, son pain quotidien est fait de campagnols et autres rats taupiers. Et pour l’agriculteur qui travaille avec des couverts et des paillis pour nourrir sa vie du sol, et en particulier ses vers de terre, le renard est un précieux auxiliaire pour réguler les populations de rongeurs. »

Conclusion

Dans cet article, mon point de vue est strictement agricole. Et loin de vouloir comparer ou mettre en concurrence, nous avons d’un côté le loup et l’ours dont les dégâts agricoles coûtent des millions d’euros tous les ans à la société, des animaux protégés à juste titre, et de l’autre, le renard, un nuisible qui protège les cultures.
Voyez-vous l’incohérence : moins de renards = plus de pesticides.
Et pourquoi la politique, qui s’applique à l’ours et au loup ne s’appliquerait pas au renard ? Par une gestion responsable des populations. Et pour ses services rendus à la Nation, une indemnisation des rares dégâts qu’il peut commettre chez les éleveurs de poules en plein air. Quant aux dégâts sur le gibier, dont les chasseurs l’accusent, il y a encore peu, quand l’environnement était propice, il y avait beaucoup plus de renards qu’aujourd’hui, et la campagne était giboyeuse. Le problème est ailleurs.

Pour compléter, un témoignage d’agriculteur :

Christophe Gatineau, agronome, cultivateur et auteur chez Flammarion de l’Éloge du ver de terre (2018) et de l’Éloge de l’abeille (2019), rédacteur du blog www.lejardinvivant.fr