Mycoagra

  • Endomycorhize dans une racine de féverole
  • Un des résultats de l'expérimentation Mycoagra
  • Couvert d'interculture avant maïs entre rangées de noyers
11
avril
2022

Mycoagra, ses enseignements

La chambre d’agriculture de Dordogne a porté le projet Mycoagra que nous avons présenté il y a quelques années dans cette Tribune mais aussi dans la revue TCS. Dans cette dernière, nous avions consacré un dossier aux champignons mycorhiziens en 2018 (TCS n° 98 de juin/juillet/août 2018).
Objectif du projet Mycoagra : intégrer les symbioses mycorhiziennes dans les réflexions et les pratiques agronomiques favorables aux sols. Pour cela, la chambre s’est entourée de plusieurs partenaires scientifiques (Inrae, Muséum National d’Histoire Naturelle, Institut Unilasalle, CTIFL, Station de la Noix de Creysse), d’agriculteurs et d’étudiants. Deux cultures, largement représentées en Dordogne, Corrèze et Lot, l’une pérenne et l’autre annuelle, ont été choisies pour le projet : le noyer et le maïs. Nous ne reviendrons pas ici sur le dispositif expérimental et les types d’analyses effectuées. Nous vous invitons, pour cela, à relire le dossier du TCS 98. Simplement, rappelons que cinq modalités de culture ont été analysées par rapport à leur incidence sur les communautés mycorhiziennes pour évaluer les pratiques favorables à ces communautés :
• Noyers en culture conventionnelle avec intrants chimiques (engrais minéraux, herbicides) ;
• Noyers en culture biologique avec fertilisation organique seule ;
• Noyers en culture conventionnelle et biologique avec couverts végétaux dédiés à base de légumineuses implantées en inter-rang après récolte ;
• Noyers en plantation, en association avec maïs en inter-rang ;
• Maïs avec semence traitées par fongicide de contact à large spectre et semences non traitées.

Deux fois plus d’intensité de mycorhization avec couvert de féverole

Un des résultats de l'expérimentation Mycoagra
L’un des premiers résultats obtenus, a été le nombre important de champignons mycorhiziens identifiés. 520 Unités Taxonomiques Opérationnelles (OTUs) d’endomycorhizes ont été identifiées par séquençage ADN sur les racines de l’ensemble des plantes échantillonnées (noyers, maïs, couverts végétaux). « Certains genres de champignons et leurs souches sont prédominants comme Glomus et Rhizophagus, tandis que d’autres se retrouvent en proportion plus faible comme Septoglomus et Funneliformis. Mais tous ont un rôle à jouer dans la symbiose avec la plante  » précise François Hirissou, ancien conseiller agronomique à la Chambre.
Les noyeraies conduites en mode conventionnel avec fertilisation minérale et désherbage sur le rang sont moins mycorhizées que celles conduites en bio avec fertilisation organique et désherbage mécanique. Mais surtout, les noyeraies conduites en conventionnel ou en bio avec un couvert végétal dédié à base de féverole (150 kg/ha) de fin octobre à fin avril, présentent une intensité de mycorhization deux fois plus élevée que dans les modalités sans couvert de légumineuses et une abondance arbusculaire deux (conventionnel) à quatre fois plus élevée (bio).

La féverole assure un relais mycorhizien

L’analyse des taux de mycorhization de toutes les espèces en mélange dans les couverts végétaux aussi bien que celles répertoriées dans les enherbements naturels des parcelles liées à l’étude, montre que la féverole est l’espèce présentant le meilleur taux de mycorhization. « On peut avancer l’hypothèse suivante sur le relais mycorhizien assuré par la féverole, explique l’agronome : en période hivernale, les noyers ralentissent leur photosynthèse. Cela freine les flux de sucres dans les vaisseaux de la plante et vers les champignons symbiotiques, qui se retrouvent de fait beaucoup moins sollicités. Dans ces conditions, le maintien des champignons mycorhiziens sous forme d’hyphes est compromis. Les féveroles qui sont actives pendant l’hiver, maintiennent leurs populations endomycorhiziennes en fonctionnement. Celles-ci sont alors actives pour coloniser directement le noyer sans perte de temps, à sa reprise de végétation au printemps, lui permettant ainsi de bénéficier de cette symbiose immédiatement ».

Un réseau commun mycorhizien entre les noyers et les maïs

L’association noyers-maïs a été étudiée sur la station expérimentale du Creysse (Lot). Des mesures de carbone 13 ont révélé que le mycélium recevait à la fois du carbone des noyers et du maïs, «  et le fait que l’un des OTUs les plus prédominants ait été détecté dans les systèmes de racines des deux plantes permet d’émettre l’hypothèse de la présence d’un Réseau Commun Mycorhizien (RCM) entre ces plantes. Ce réseau assure la fourniture de carbone d’une plante à l’autre, et donne une preuve d’un lien physiologique entre une culture pérenne (le noyer) et une culture annuelle (le maïs) en association mutualiste grâce aux mycorhizes » précise F. Hirissou.
Enfin, l’étude de l’impact du traitement des semences de maïs avec un fongicide (Thirame) sur la colonisation mycorhizienne de la plante a montré que les semences non traitées présentaient une fréquence de mycorhization quatre fois plus élevée que les semences traitées et une intensité arbusculaire de la partie mycorhizée également quatre fois plus élevée.

« Cultiver ses mycorhizes »

En finalité, Mycoagra conduit aux conclusions suivantes, éléments d’une démarche agroécologique :
• L’utilisation des réseaux mycorhiziens des parcelles par la pratique de cultures mycorhizogènes (légumineuses) et notamment des couverts végétaux, ainsi que leur diversification dans le temps (rotations, relay cropping).
• La densification de ces réseaux mycorhiziens par la réduction de travail du sol et le semis direct sous couverts, la fertilisation organique, l’arrêt progressif d’utilisation d’intrants nocifs aux mycorhizes (fongicides, herbicides...).
• L’introduction de propagules du commerce à partir de souches standards ou la multiplication et l’exploitation des souches naturelles des parcelles, « ce qui revient à cultiver ses mycorhizes ».

Si Mycoagra s’est terminé en 2021, F. Hirissou indique que le programme se poursuit au travers d’un site Internet (https://mycoagra.com) mais aussi de formations.

Cet encadré est principalement issu d’un article écrit par François Hirissou « Les mycorhizes, des alliés dans l’alimentation et la protection des plantes » – 09/2020 Chambre d’agriculture de Dordogne.

L’ancien agronome François Hirissou fait également l’objet d’une interview dans le TCS 117 de mars/avril/mai 2022.


14
août
2018

La couleur et la forme des plantes racontent la présence des microbes

Voici une vidéo d’une conférence donnée en 2018 par le professeur du Muséum National d’Histoire Naturelle, Marc André Sélosse.
Il s’agit d’une conférence de vulgarisation sur : “Jamais seules – Pourquoi il n’y aurait pas de plantes sans microbes ?“ (en français, diapos en anglais). Elle résume une vision nouvelle par les microbes ;en quelques mots :
Les plantes sont habitées et construites de bactéries et de champignons, de la racine à la fleur, de leur nutrition à leur protection. Découvrez une nouvelle vision du végétal !

Et en prime, un cliché tout récent d’un champignon mycorhizien à arbuscules présent dans une racine de féverole...

Endomycorhize dans une racine de féverole
Endomycorhize dans une racine de féverole
Cette photographie montre, par coloration, les arbuscules d’une endomycorhize ayant pénétré dans une racine de féverole. Photographie réalisée dans le cadre du projet Mycoagra.

26
juillet
2018

Champignons mycorhiziens et symbiose mycorhizienne

JPEG - 245.3 koUn dossier sur les premiers résultats issus du projet Mycoagra est paru dans TCS n° 98 de juin/juillet/août 2018.
Ce dossier se présente en 2 parties ; à consulter dans le lien suivant.


23
mai
2017

Exemple d’un essai Noyers et maïs

Emma Mortier a débuté un travail de thèse à l’Université de Dijon, partenaire du projet Mycoagra, au sein de l’UMR Agroécologie.
Objectifs de son travail : l’étude de l’impact des pratiques culturales sur le fonctionnement de la symbiose mycorhizienne à arbuscule dans un système agroforestier noyer - maïs.
"« C’est un axe de recherche qui nous paraît intéressant car même si les cultures sous noyers ne peuvent se faire que les premières années, cette pratique nous rapproche d’une agroforesterie de rapports pas trop tardifs qui peuvent intéresser les producteurs et notamment ceux qui mettent en place des haies fruitières pas trop ombragées »" indique François Hirissou de la chambre d’agriculture de Dordogne, acteur du projet.
Les champignons mycorhiziens à arbuscule peuvent former un réseau de mycélium commun entre plantes hôtes d’espèces différentes, par exemple entre noyers et maïs.
Exemples de questions dont les réponses seront, on l’espère, apportées grâce à ce type d’étude :
Quelle plante transfère le plus de carbone au champignon ?
À quelle plante le champignon transfère-t’il le plus d’azote ?
La présence d’une interculture favorise-t’elle la persistance du RMC (réseau mycélien commun) ?
Qu’apporte le RMC à la production en termes de qualité et de rendement ?
Les intercultures (voir photo) sont-elles plus favorables au développement et au maintien du RMC comparativement aux engrais azotés ?

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Nous ne manquerons pas de vous informer de l’avancement de l’étude et, plus globalement, du projet Mycoagra. A bientôt donc pour de premiers résultats !

Couvert d'interculture avant maïs entre rangées de noyers
Couvert d’interculture avant maïs entre rangées de noyers