Mardi 19 janvier 2016
Thierry Stokkermans

Originaire du Sud-Ouest de la France, Thierry STOKKERMANS a travaillé en Espagne, Nouvelle-Zélande et Australie avant de s’installer aux Pays-Bas. Convaincu par le semis direct à faible perturbation, il conçoit et développe aujourd’hui des machines agricoles (zip drill).

Le taux de matière organique en ‘‘live’’ sur le téléphone portable : SOCiT

En Ecosse, depuis 3 ans, il est possible de “mesurer” le taux de matière organique du sol avec son Smartphone ou sa tablette. Pour cela, il suffit d’avoir l’application et le témoin SOCiT, de prendre une photo du sol et de la faire analyser. C’est simple, gratuit et rapide.
SOCiT veut dire Soil Organic Carbon information, soit Information sur le Carbone Organique du Sol. L’initiative est gérée par le James Hutton Instituteet Dr. Matt Aitkenhead est le chef de projet. L’outil est gratuit et disponible pour tout le monde en Ecosse (agriculteurs, agronomes, …). Avant d’aller au champ, l’utilisateur doit télécharger SOCiT sur son téléphone ou sa tablette, s’enregistrer en tant qu’utilisateur et recevoir la carte-témoin SOCiT (voir photo).


Illustration application outil Socit

Une fois l’application et le témoin en poche, l’utilisateur va au champ et prend une photo du sol avec le témoin en évidence dans le champ de vision. Il envoie la photo géo-référencée au serveur (utilisation de la 3G, 4G ou wifi) et reçoit dans la minute le taux de matière organique et le taux de carbone du sol. Le passage par le serveur est obligatoire car l’algorithme est trop lourd pour un Smartphone et il y a une base de données contenant des informations pédologiques, climatiques et topographiques (altitude) nécessaires au calcul.
Le code qui calcule le taux de matière organique est basé sur la méthode LUCAS, mise au point au JRC Ispra en Italie. La méthode consiste à utiliser la spectrométrie infra-rouge pour déterminer le taux de matière organique. C’est à priori la méthode que l’IRSTEA utilise en France (voir article de Christophe De Carville). Mais sur les Smartphones et les tablettes, il n’y a pas (encore) de capteur infra-rouge. Du coup, l’équipe du James Hutton Institute a convertit le spectre infra-rouge en palettes RGB (Red, Green, Blue soit rouge, vert et bleue en français) qui sont capturées par les photos numériques. Un algorithme a été écrit pour traiter la photo et donne le taux de matière organique.
Selon Matt Aitkenhead, il y a entre 100 et 200 utilisateurs en Ecosse et un peu plus de 1000 photos ont été traitées en 3 ans. La précision reste faible. Elle est de +/- 20%. Par exemple, pour un taux de matière organique de 2%, il est possible de recevoir n’importe quelle valeur de 1,6 (-20%) à 2,4 (+20%). Ce sont des variations importantes. En effet, si on veut comparer un champ en agriculture de conservation à un champ voisin en labour traditionnel, il n’est pas certain que l’on puisse en tirer des enseignements précis. Néanmoins, Matt Aitkenhead précise que 90% des résultats sont dans une plus petite fourchette : +/-10%. Soit pour un taux de matière organique de 2%, 90% du temps, le résultat SOCiT sera compris entre 1,8 et 2,2. Ce qui est déjà plus acceptable. Le chef de projet explique que le principal facteur de variation est le taux d’humidité du sol. En effet, il est connu que la couleur du sol change avec l’humidité. Un sol sec est souvent de couleur claire alors qu’un sol détrempé est souvent sombre. Malheureusement, la photo RGB ne sait pas calculer le taux d’humidité du sol.
Ce système est aujourd’hui disponible en Ecosse et Matt Aitkenhead a le projet de le rendre européen. Cela passe par l’extension de la base de données à toute l’Europe et la mise en place d’un service d’envoi de carte témoin à tout le territoire. Le but ici est de conserver la gratuité du service pour que chaque utilisateur puisse mesurer le taux de matière organique rapidement et simplement.