« Le désherbage est notre problématique principale, signale Christian Etourneau, technicien à la station de Brain-sur-l’Authion (Maine- et-Loire). Dans la grande majorité de nos essais, nous recherchons une combinaison entre la sélectivité des programmes de désherbage de la culture et les effets de couverture et protection. »
Au-delà du traditionnel tournesol ou de l’orge pour l’implantation des légumineuses comme la luzerne, le trèfle mais aussi des graminées fourragères (dactyle, ray-grass, fétuque…), la station travaille, depuis trois années, le couvert de maïs en implantations simultanées pour limiter les passages et les coûts avec des résultats intéressants. Beaucoup de programmes herbicides maïs, et principalement ceux à base de Prowl 400 et de Basagran SG, peuvent être sélectifs de certaines graminées mais aussi des légumineuses en général. Ainsi, il est possible d’obtenir une bonne implantation de la culture porte-graine sous le maïs qui va vraiment prendre place à l’automne après la récolte. L’ensilage, même s’il risque de tasser le terrain, semble le mode de gestion le plus approprié en redonnant de l’espace et de la lumière assez tôt en saison sans une masse de résidus afin de permettre une bonne consolidation de l’installation de la culture à l’automne. Les deux années d’expérimentation ont permis d’observer une réduction de l’enherbement et donc des coûts de désherbage mais aussi un très bon rendement graines l’année suivante.
Par ailleurs et après avoir testé avec succès les implantations sous couvert de moutarde mais aussi d’avoine strigosa après moisson dans le but de limiter le salissement et protéger les jeunes pousses, cette année, des implantations de trèfle et de luzerne ont été réalisées sous un mélange des deux (3 kg de moutarde + 10 kg d’avoine et la dose pleine de la culture portegraine).
L’idée est de maximiser
la couverture tout en limitant
la concurrence, qui peut
être forte par ces plantes de
service assez agressives, même
si l’année dernière une luzerne
a donné des résultats très
acceptables dans une moutarde
à 10 kg/ha qui l’avait
presque éliminée à l’automne.
Pour F. Deneufbourg responsable
du service semences
fourragères, le mélange d’espèces
pour couvrir est très sécurisant
tout en diminuant la
concurrence sur la culture. À
ce titre, pourquoi ne pas ajouter
de la féverole, une autre
plante de couverture remarquable
pour l’implantation de
luzerne ou de trèfle, ou bien
des pois ou du lin. En complément
C. Etourneau assure
que ce mode d’implantation
peut aussi limiter les soucis
de ravageurs, citant comme
exemple une parcelle où le
trèfle en solo a été consommé
par les limaces au point d’être
ressemé alors qu’avec la moutarde
comme plante d’accompagnement, il a été sauf.
Travaillant de manière étroite
avec les producteurs mais
aussi avec des chercheurs et
agronomes, aujourd’hui les
idées et expérimentations fusent :
– Des graminées et entre
autres de la fétuque rouge
sont essayées en implantation
de printemps précoce
sur une culture de colza où
l’ensemble du programme de
désherbage est terminé. Bien
qu’il faille caler la gestion des
repousses de la culture et le
rebroyage des pailles afin de
limiter la concurrence et la
couverture par les résidus, les
premiers résultats sont très
encourageants.
– Des implantations de graminées
et entre autres de
ray-grass sous culture de blé.
Dans cette option, l’ensemble
du désherbage est conduit
à l’automne, et les cultures
porte-graines sont semées au
printemps juste à la reprise de
végétation. La céréale conduite
de manière conventionnelle
est peu concurrencée, et les
graminées en place peuvent
vraiment se développer après
la récolte. Pour ce type d’itinéraire,
il est préférable de
choisir un blé à du triticale,
plus couvrant, et de ramasser les pailles pour éviter de trop
couvrir les jeunes plantes et
restreindre la disponibilité en
azote.
– Des légumineuses de couverture
(pois, trèfle incarnat,
minette, sainfoin, lentille)
en association avec des
carottes porte-graines afin
de limiter le salissement et
fournir de l’azote en seconde
partie de cycle. Les meilleurs
résultats sont obtenus lorsque
la légumineuse est détruite
tôt au printemps avec un bonus
de 20 à 30 kg d’azote sur
la carotte.
– Des implantations de graminées
(fétuque) sous couverts
de féverole et de pois
qui, récoltés, vont fournir, par
le relargage, une bonne partie
de l’azote nécessaire aux
graminées à l’automne mais
surtout au printemps suivant.
En complément, pourquoi ne
pas réimplanter en direct un
couvert de légumineuses en
mélange pendant l’interculture
d’été et d’automne pour
occuper l’espace et limiter le
salissement tout en renforçant
l’effet azote pour le printemps
suivant ?
– Un semis pour trois récoltes
sur trois ans. Sur le
modèle danois qui a développé
ce type d’implantation
depuis longtemps, la Fnams
innove encore en testant depuis
ce printemps un premier
mélange triple. Il s’agit d’un
maïs dans lequel a été semé
simultanément dans les entre-
rangs du trèfle violet et
de la fétuque. Le maïs va être
ensilé à l’automne avec une
implantation réussie des deux
cultures fourragères malgré le
programme de désherbage
(Prowl 400 + Basagan SG).
Au printemps prochain, l’idée est de calmer la fétuque avec une petite dose d’antigraminées afin de donner la primeur au trèfle violet qui sera récolté après une précoupe début mai. L’année suivante, c’est le trèfle qui sera détruit chimiquement afin de laisser la place mais aussi de fertiliser un peu la fétuque qui sera récoltée. « Cet enchaînement ambitieux mais qui imite les cycles observés entre légumineuses et graminées peut fonctionner », explique le technicien assez confiant au vu de l’implantation.
Bien que les problématiques des producteurs de semences de cultures fourragères et potagères paraissent assez éloignées des TCSistes et SDistes, les difficultés de désherbage et la longue expérience de semis sous couvert de cultures apportent en matière d’association une solide expérience et de nouvelles idées assez faciles à adapter en AC, surtout en présence d’élevage.