En semis direct, il est important de fournir un peu d’azote à la plantule pour l’aider à démarrer. La fertilisation localisée est l’outil idéal pour apporter le “petit déjeuner” et les engrais organiques semblent le florilège mais attention les accidents sont possibles et sont déjà arrivés. Voici un retour d’expérience du printemps 2016 sur des tournesols.
La localisation de l’azote en semis direct permet de pallier au blocage dû aux jeunes résidus. En effet, les végétaux en décomposition à la surface mobilisent et bloquent une grande quantité d’azote et, par conséquent, l’élément devient rare dans l’horizon superficiel. La fertilisation localisée est l’outil idéal pour palier à la situation. Lorsque la localisation de l’engrais est nettement séparée de la graine, il est possible de mettre une dose importante d’azote sans risque pour la plantule. Par contre, lorsque l’engrais azoté est localisé dans le sillon de la graine, il est possible que le germe soit brulé par l’azote fraichement libéré. Pour éviter cela, une des solutions est d’utiliser un engrais organique qui mettra plus de temps à libérer l’azote. Ce sont des engrais dits “doux”.
Aux Pays Bas, le bouchon de fientes de poulets est un engrais organique largement disponible et attractif de par son prix. En NPK, il dose 4-3-3 et sur le bon, il est indiqué que son C/N est supérieur à 10. Avec une tonne par hectare de ce produit, l’apport azoté est de 40 unités. Ceci suffit pour couvrir les besoins de la culture de tournesol.
Ayant un engrais “doux” sous la main, des besoins de culture plutôt faibles et un semoir capable d’apporter de grandes quantités, il a été décidé de solder tout l’engrais au semis. Le semis direct du tournesol a eu lieu le mardi 17 mai. L’engrais organique a été localisé auprès de la graine. L’opération s’est bien passée et le tracteur a été rentré avec la satisfaction du travail bien fait.
Dans les jours qui ont suivi, le sud des Pays Bas a connu un épisode “pluie, mare et canard” identique au nord de la France. Il y a eu des flaques d’eau sur la parcelle qui ont duré plusieurs semaines (inconvénient du Plat Pays). La levée du tournesol s’est mal passée. Une partie des pertes est directement liée à l’excès d’eau mais il y a des zones où les pertes sont plus difficiles à expliquer. En effet, l’eau y a stagné moins longtemps, voire pas du tout. La semence était traitée et il n’y avait pas de traces de prédateurs. Par conséquent, la question s’est posée : est ce que l’engrais n’a pas eu un effet sur l’émergence des plantes ?
Un essai a été mis en place pour vérifier l’hypothèse. Il ne faisait que quelques mètres carrés. Il y avait deux traitements : le premier est le témoin 0, il est sans engrais (figure 1) et le second avec l’engrais “doux” à la dose de 1000 kg/ha (figure 2). Comme dans la première parcelle, le tournesol est semé à 75 cm d’inter rang, il y a donc 5,5 graines par mètre linéaire et 75 g d’engrais. L’essai a été semé la troisième décade de juin.
La conclusion est sans appel : les bouchons de fientes de poulet ont eu un effet négatif sur la levée (figure 3). En effet, dans ce deuxième essai, le traitement “avec engrais” a presque perdu 100% des graines. Alors que, comme le montre la figure 4, le traitement “sans engrais” s’en sort plutôt bien (sans être parfait pour autant car il y a quelques pertes).
Il ressort de l’essai qu’un excès de bouchon de fientes de poulet en localisé dans le sillon a un effet négatif sur la levée du tournesol. Néanmoins, il reste une question en suspens : quel élément/partie de l’engrais organique a eu un effet négatif sur la semence/plantule ? En effet, l’azote peut bruler un germe mais la décomposition de la matière organique peut aussi attaquer et tuer un germe. Ce dernier phénomène est connu de certains SDistes utilisant des semoirs à disques. Lorsqu’il y a du “hairpinning” et de la pluie par la suite, la décomposition des végétaux libère un jus acide qui attaquent les germes. Une attaque sévère tuera les germes. Au même titre que les résidus de surface, le bouchon de fiente de poulet est une matière organique fraiche et il est possible que sa décomposition libère suffisamment de jus acide pour venir à bout des germes de tournesol. Par conséquent la question reste ouverte : est ce que les pertes de tournesol sont dues à des brulures azotés ou à des jus de décomposition de la matière organique fraiche ?
Pour conclure, il est intéressant de rajouter que du maïs a été semé dans les mêmes conditions (même semoir, même engrais, même réglage et même terroir) et, paradoxalement, le maïs a plus de 90% de plantes levées. Cela met encore une fois en évidence la sensibilité du tournesol quant à son emblavement et le besoin de cette graine pour un semis de qualité.