Un article de C.Beral, SCOP Agroof
Dans les motivations à l’implantation de parcelles agroforestières, la fertilité des sols (enrichissement en matières organiques, amélioration de l’activité biologique) fait partie des services les plus attendus. En effet, il n’est pas absurde de penser que les arbres en apportant chaque année une litière aérienne, mais aussi souterraine, puissent contribuer à améliorer la fertilité des sols. Les questions sont de savoir : Dans quelle mesure les arbres impactent ils la fertilité des sols ? Comment s’organise cette fertilité dans l’espace (distance aux arbres, profondeur) et dans le temps (âge du système) ? Et enfin, comment gérer cette fertilité ?
Une influence de la haie jusque 30 m dans le champs
Récemment, une étude belge menée par Pardon et al. (2017) s’est penchée sur la variabilité spatiale du carbone organique et des principaux nutriments dans des parcelles de moins de 5 ans avec de l’agroforesterie intraparcellaire, et des parcelles simplement bordées d’une haie de peupliers de plus de 17 ans.
Sur les parcelles entourées de haies, ils ont pu montrer une augmentation des stocks de carbone organique (en moyenne + 5300kg/ha) et des teneurs en nutriments (en moyenne 108 kg K /ha ; 45 kg Mg / ha ; 86 kg P / ha ; 16 kg Na /ha) à proximité des haies, et cela sur une profondeur de 30 cm. Cette augmentation suit un gradient décroissant avec la distance à la haie et peut s’observer jusqu’à 30 m dans le champ. Dans les parcelles agroforestières plus jeunes, ce gradient n’a pas été mis en évidence. La jeunesse des arbres explique en grande partie ce résultat.
En complément, les thèses de Rémi Cardinael (2013 – 2015) et celle d’Esther Guillot réalisées au sein de l’INRA UMR ECO&SOLS), mettent en évidence le rôle non négligeable du linéaire sous arboré (bande enherbée) notamment dans les premières années de la vie du système lorsque l’impact des arbres est encore faible. En effet, sur une parcelle agroforestière de 20 ans complantée entre noyers hybrides/rotation céréalière à base de blé (en conventionnel et labour), il apparait (sur les 0 – 15 cm de profondeur étudiés) une forte augmentation de la biomasse microbienne, de sa teneur en C, N et P sur la ligne d’arbres, comparativement au milieu de l’inter-rang cultivé et du témoin agricole (sans arbres). Cette augmentation a pu être perçue jusqu’à 2 m dans l’inter-rang. Cet effet a également été observé dans des parcelles plus jeunes de 5 à 10 ans.
Influence de la bande enherbée puis de l’arbre
S’il reste encore à évaluer l’ampleur de ces processus dans une diversité de systèmes et de pratiques, et à comprendre aussi la dynamique de ces éléments en fonction de l’activité biologique des sols, des pistes de gestion se dégagent petit à petit. Ainsi, il est clair que dans leurs jeunes années, la contribution des arbres est très faible, et ce n’est qu’à maturité que les arbres produisent suffisamment de litière pour représenter des gains de MO suffisamment intéressants. Par contre, la bande enherbée à leur pied est rapidement fonctionnelle et peut être pensée et gérée de manière à favoriser certains services (stabilité du sol, refuge pour la pédofaune, stockage de carbone…etc.). Par ailleurs, les pratiques dans l’inter-rangs sont également déterminantes (techniques relevant de l’agriculture de conservation), et c’est bien cette complémentarité qu’il faut raisonner.
Références
Publication de Pardon et al., 2017 : https://www.researchgate.net/publication/318373716_Trees_increase_soil_organic_carbon_and_nutrient_availability_in_temperate_agroforestry_systems
Thèse de Rémi Cardinael : http://www.umr-ecosols.fr/recherche/these-et-hdr/84-cardinael-remi
Le projet AGRIPSOL : http://www.agripsol.projet-agroforesterie.net/