Michel LAMBOTTE

  • La pompe biotique, versus couvert Biomax
  • Semis direct de haricots sur retour de soya, suivi d'un semis de seigle.
  • Semis direct dans un couvert de sorgho - Sud Ouest de la France
6
août
2018

Perspectives de chauffage en couches chaudes sur brf pour semis précoces

Aujourd’hui un engouement de plus en plus prononcé pour le bois énergie se fait jour, ce qui est normal et dans un certain sens une bonne chose. Cela signifie qu’enfin le pouvoir politique et économique s’intéresse au développement de ce qu’on appelle la biomasse.
Il faut savoir aussi qu’avant d’obtenir ce bois énergie, il est nécessaire de maintenir les sols en bonne santé et les superficies susceptibles d’être consacrées à la production de bois énergie ne représentent pas grand-chose vis-à-vis des superficies agricoles qui ont perdu leur matière organique. D’un côté il y a manque de carbone et de l’autre un potentiel qui a du mal à être valorisé.
JPEG - 360.1 koCependant on peut se réjouir de l’initiative prise par les pouvoirs publics en ce qui concerne les arbres au bord des autoroutes en Wallonie. Certains vont dire qu’il y a mieux que cela à faire, bien sûr, mais il ne faut pas faire la fine bouche ; l’évolution est possible si on la stimule.
https://www.rtbf.be/info/regions/detail_autoroutes-wallonnes-des-milliers-d-arbres-coupes-pourquoi-et-pour-quoi?id=9845835

On peut aussi envisager l’agroforesterie c’est à dire l’arbre dans l’agriculture sous couvert en envisageant une forte réduction, voire le zéro intrant de synthèse.

Fabien Liagre l’explique très bien ici : http://agriculture-de-conservation.com/Fabien-Liagre-L-agroforesterie-peut-etre-adaptee-a-tous-les-systemes-de.html .
« Nous travaillons en ce moment sur une valorisation intermédiaire avec des systèmes dans lesquels les branches sont coupées et déchiquetées tous les 4-5 ans pour faire du bois raméal fragmenté, du bois-énergie ou encore de la biomasse pour la chimie verte. Cela peut devenir très intéressant car la production de tonne de matière sèche à l’hectare peut être bien valorisée comme production non- alimentaire, pour laquelle il y a une forte demande. Ainsi, pour 1 m3 de bois d’œuvre, il est possible d’obtenir par exemple 1 à 3 m3 de biomasse pour du bois-énergie. La chimie verte – le remplacement du plastique et des molécules entrant dans la composition des produits ménagers et cosmétiques par des matériaux naturels – est un domaine en plein essor qui est très intéressant pour la valorisation des arbres car il nécessite un volume conséquent. »

Notre contribution

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Voici notre modeste contribution au jardin de Jupille ; il s’agit d’utiliser le broyat pour réaliser une couche chaude. Nous avons opté pour 1 m3 de broyat grossier avec un C/N élevé additionné de 3 brouettes de broyat de ronce et 3 brouettes de fumier de cheval pour baisser le C/N. Nous avions installé des isolants sur le tas de telle
manière qu’il ne se refroidisse pas trop lors des nuits de février à -8°C ; ce n’est pas nécessaire et pas très écologique. Les deux caissons en polycarbonate de 16 mm par contre, sont nécessaires.

Production de fin mai et installation de ces tomates, aubergines et laitues à même l’emplacement du tas, le reste du tas est utilisé à une culture de poireaux, laitues et
choux rave et à la production de terreau pour l’année prochaine. La présence du filet au dessus des laitues n’est là que pour empêcher les chevreuils d’en faire leur choux
gras : et oui même près des villes, la nature reprend ses droits.
Nous avons constaté que les racines descendent dans le tas et dès lors, les plans se portent beaucoup mieux ; c’est une idée qu’il faut exploiter avec des cadres alvéolés.
Il me semble qu’au vu des résultats plus qu’encourageants obtenus, une étude plus poussée devrait être réalisée. L’idée serait d’utiliser au mieux le potentiel.

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Levée des semis début mars
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Production de fin avril
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Production de mai
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Plantation des tomates à même le tas
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Laitues protégées des chevreuils

On peut déjà mettre en évidence plusieurs points de ce potentiel :

- Le tas est capable de chauffer suffisamment fort et longtemps pour mener à bien un semis précoce aussi fragile que celui de tomates.
- Le semis à même le tas semble renforcer les plantes ; reste à prévoir le protocole pour récolter sans abîmer les racines.
- En première estimation, de mi février à mi mai, on pourrait produire environ deux fois la surface du tas comme présenté sur la quatrième photo.
- Il n’y a pas d’exclusive quand à l’origine et à la nature des composants du tas mais il semble que réduire les déplacements pour la collecte semble une mesure judicieuse pour augmenter la productivité.
- La présence du tas ne semble pas affecter le sol ; nous pensions trouver un sol compact sous le tas. C’est tout le contraire que nous avons découvert, reste à voir comment la culture va évoluer.
- Les résidus du tas peuvent être utilisés pour amender une terre qui en a besoin.
- Enfin on peut penser que cette expérience utilise au mieux le recyclage des végétaux, ce qui permettrait dans un premier temps de mieux valoriser la production des déchetteries.
Ayant fermé les caissons pendant plusieurs semaines pour éviter le gel (semis à partir du 10 février) et avec le peu de lumière de ce mois, nous pensions que les plantes fileraient. Cela n’a pas été le cas et mon hypothèse réside dans le fait que le tas produit une grande quantité de CO2 qui alimente les plantes. Qu’en pensent les experts ? Le compostage est contesté mais il pourrait servir à cela, ce
n’est qu’une hypothèse. https://www.youtube.com/watch?v=x1rZuqKp4e0
Aujourd’hui on parle beaucoup de réchauffement climatique mais je pense qu’on ne pose pas le vrai problème ; c’est surtout le manque de couverture du sol qui pose problème avant celui du CO2, ce thème sera l’objet d’un prochain article.
Si la clairvoyance des responsables est au rendez-vous, on peut envisager une recherche tous azimuts sur ce procédé en espérant aboutir à une meilleure gestion du paysage ainsi que des activités durables.


18
juin
2018

Convaincre le citoyen

Potirons sous CV et haricots sansAu potager collectif, j’échange souvent avec un ami que je connais depuis 45 ans. Comme moi il est d’origine ardennaise (têtu comme une mule...)
Voyant qu’il avait un épais couvert de moutarde, je lui ai proposé de cultiver son jardin sans travail du sol.
Pour les potirons c’était ok ; pour les haricots, c’était niet : il fallait travailler le sol.
On voit le résultat, le plein de digitaires dans les haricots, un peu dans les potirons là où le couvert n’est pas assez épais. Aujourd’hui, les potirons ont pratiquement couvert toute la surface, et je l’ai prévenu de ne pas trop remuer la terre, de peur de réveiller les digitaires.
Que faut-il de plus pour montrer l’effet du travail du sol sur le réveil des adventices ?
Il est très content du choix que je lui ai proposé pour ses potirons, pas de travail du sol, potirons plantés rapidement et une propreté relative de ceux-ci grâce au couvert de moutarde.
C’est à mon avis une bonne base pour le convaincre d’un autre type de couvert plus conséquent ; on va travailler là-dessus.
Comme vous le dites tous, il faut travailler la photosynthèse et foutre la paix au sol.
Encore une preuve qu’il faut se convaincre et convaincre par étapes.


18
janvier
2018

Avancement agroécologique aux Coins de terre de Jupille

Cet article avec beaucoup de photos pour décrire l’état d’avancement de l’agroécologie et de la prise de conscience de la nécessité de la couverture des sols.

Potager de Jupille - Hiver 2017-2018 - 1Voici ma parcelle parée pour l’hiver. Il y a encore des légumes à récolter et une fois récoltés, à l’emplacement de ces derniers du brf sera épandu, le tas se situe à droite de la photo.
Définition de l’agroécologie : Faire le plus grand usage possible de l’énergie solaire et du carbone de l’air : que pas un rayon de soleil ne tombe par terre - Marc Dufumier.
On peut penser que cette parcelle est dans cette configuration même si elle a l’apparence d’un « chaos organisé ». Il faut savoir qu’avec le couvert, en sous
traitant le travail à la vie du sol, on permet une diminution du temps de travail physique et dès lors on libère du temps pour l’observation, pour les expériences ainsi que l’obtention des connaissances par le Net, le dialogue ou autres conférences.

Potager de Jupille - Hiver 2017-2018 - 2Voici la parcelle de mon voisin, un jeune en dernière année d’étude d’ingénieur agronome en forêt tropicale. C’est sa première année de potager collectif. Très ouvert d’esprit, il s’est inspiré de mes réalisations tout en
appliquant bien-sûr ses intuitions ou autres connaissances agronomiques. Il a fait progresser l’état de la parcelle. Il y a une condition pour que d’autres jeunes aillent dans ce sens : ne pas avoir peur de se mettre à quatre pattes et se salir les mains, mais rassurez vous, l’agroécologie n’a rien de rébarbatif, c’est même très passionnant.

Potager de Jupille - Hiver 2017-2018 - 3Cette parcelle (d’une personne dans les 70 ans avec qui je dialogue beaucoup) est couverte de feuilles. C’est très difficile de faire passer l’idée
d’une couverture en permanence chez les plus âgés. On peut comprendre que l’idée
d’une terre propre est bien ancrée dans leur esprit. Ceci dit, ce n’est pas par décret que l’agroécologie va être perçue pas ces personnes mais bien par l’exemple.
Les jeunes sont beaucoup plus réceptifs ce qui est normal et cela me fait penser au
centième singe de Ruppert Sheldrake http://sechangersoi.be/4Articles/Sheldrake01.htm Ce n’est qu’une hypothèse qu’il faut encore vérifier.
« Ainsi, quand un certain nombre critique d’individus accompli une prise de conscience, cette nouvelle prise de conscience peut être communiquée d’un esprit à un autre. »

Potager de Jupille - Hiver 2017-2018 - 4
Voici une parcelle couverte d’un engrais vert de phacélie. A la première gelée un peu conséquente, la terre se retrouvera nue et deviendra la proie des « mauvaises herbes ».

Potager de Jupille - Hiver 2017-2018 - 5
Voici le résultat d’un bêchage, l’eau stagne sur la parcelle et malgré ce bêchage, les adventices ont la vie belle. A gauche on distingue une ligne de mâche. Le slake test réalisé auparavant montrait bien le dégât du labour et du bêchage.

Il reste encore du travail de conscientisation !!

Il nous faut considérer ce potager familial et collectif comme une recherche, voir un « centre de recherche citoyen » dans lequel il faut dépasser le débat binaire pour ou contre. Il faut dépasser les mythes, les idées reçues et les croyances pour s’installer dans la rigueur de la recherche scientifique en mettant tout à plat sans apriori. Des disciplines comme la biologie et la thermodynamique doivent nous guider dans les décisions que nous devons prendre.
Aujourd’hui comme le reste de la société, l’agriculture est à la croisée des chemins, nous devons passer de l’agriculture de l’azote à l’agriculture du carbone. D’après les recherches récentes, c’est le carbone qui est au centre du monde végétal, au niveau biologique tout vient se fixer sur le carbone.
L’arbre l’a très bien compris, son tronc est fait de carbone et le reste vient se fixer dessus.
Loin de moi l’idée de critiquer les ACistes qui font un merveilleux travail même s’il utilisent encore, mais beaucoup moins, du phytosanitaire de synthèse. Il semble qu’en tant que « modeste citoyen urbain », notre devoir est d’apporter les résultats de nos recherches dans le respect des autres. Si elles fonctionnent et sont crédibles, elles seront de toutes façons acceptées et appréciées à leur juste valeur.


6
novembre
2017

L’AC, banc d’essais de la thermodynamique ?

Dépasser la crise ?

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Beaucoup s’interrogent sur ce qu’il faudrait faire pour sortir de cette crise qu’on a de plus en plus tendance à appeler de civilisation. On ne sort pas d’une crise de civilisation, on change de civilisation, on remplace les idées qui sous-tendent l’actuelle par de nouvelles plus adaptées aux défis qui nous attendent et ils sont nombreux. Avec humilité nous devons considérer que nous ne sommes pas au-dessus des lois physiques et biologiques qui gèrent l’univers et plus proche de nous la biosphère.
Aujourd’hui nos sociétés sont régies par une représentation du monde, une manière de voir les choses, un modèle cohérent du monde qu’on appelle paradigme. On peut dire que ce dernier est axé sur une croissance capitaliste industrielle illimitée. Un nouveau paradigme qui tient compte de l’épuisement des ressources en reliant économie et écologie prend naissance sous nos yeux et entre en opposition avec le premier. Tant que les deux paradigmes ne se parlent pas, ne coopèrent pas, on n’avancera pas.
Il semble que la réflexion doit partir d’un élément présent dans toutes les activités des hommes et dans le fonctionnement de la biosphère. Cet élément est l’énergie. La science qui étudie les manifestations de l’énergie à travers les transformations qu’elle opère s’appelle la thermodynamique.
Cet article sans prétention se veut une vulgarisation de cette science à travers l’AC et l’agro-écologie qui semblent être de merveilleux bancs d’essais pour cette compréhension.

Que vient faire un article sur la thermodynamique dans un site dédié à l’agriculture ?

Il faut savoir que les plantes sont de merveilleuses « machines thermodynamiques », mais n’anticipons pas ; voici quelques rappels à propos de cette science.
Sans entrer dans des détails qui sont très bien expliqués ici http://www.francois-roddier.fr/ pour ceux qui voudraient approfondir, on peut dire que la thermodynamique renferme trois principes.

Le premier étant celui dit de la conservation d’énergie, la quantité d’énergie contenue dans l’univers est une constante : rien ne se crée, rien ne se perd tout se transforme.
La question qui vient maintenant à l’esprit est de savoir comment elle se transforme ?

Jusqu’à la moitié du siècle dernier nous n’avions que le principe de Carnot qui dit que nous ne pouvons obtenir durablement de l’énergie utile que par des cycles de transformation qui extraient de l’énergie d’une source chaude pour en renvoyer une partie dans une source froide. C’est sur ce principe que fonctionnent le moteur de nos tracteurs ainsi que toutes les machines thermiques. C’est sur ce principe qu’est bâtie notre civilisation capitaliste industrielle.
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Qu’adviendra-t-il quand l’énergie non renouvelable sera épuisée ?
On parle alors d’un système fermé, il n’y a pas d’échanges avec l’univers. Pour imager ce concept, prenons une bouteille thermo dans laquelle on verse de l’eau bouillante et des glaçons. Chacun comprendra que les glaçons vont fondre et l’eau deviendra tiède ; l’échange calorifique occasionnera des courants de convection qu’on considérera comme l’énergie utile. Quand la température sera uniformisée, on arrivera à l’équilibre thermodynamique et à l’arrêt du système ; on dit aussi qu’il est arrivé à son maximum d’entropie interne. L’entropie étant la mesure de la grandeur statistique du désordre d’un système. Plus l’entropie est élevée, moins on peut obtenir d’énergie utile.
On peut se demander que deviendra l’humanité si nous restons dans le cadre actuel. Et bien c’est la mort, mais on passera d’abord par la case du monde impossible à vivre, de là pourrait venir le sursaut salutaire.
Et si nous y étions ?

Thermodynamique appliquée au vivant : structures dissipatives d’énergie La thermodynamique des systèmes dits hors équilibre

Tout agriculteur sait bien qu’une plante se structure en consommant de l’énergie solaire ; ceux qui pratiquent l’AC cherchent par tous les moyens à produire le plus de structure végétale possible le plus efficacement possible et le plus longtemps possible durant les cycles de l’année.
Une plante construit sa structure en auto-organisation par un flux d’énergie qui la traverse venant de la source chaude qu’est le soleil pour en rendre une partie vers une source froide qu’est la nuit  ; on dit que c’est une structure dissipative d’énergie ouverte sur l’univers https://www.francois-roddier.fr/?p=370
Pour une plante, il n’y a que de 3 à 6% d’énergie incidente qui est transformée en biomasse http://botarela.fr/Poaceae/Famille/Photosynthese-2.html mais contrairement aux sociétés humaines, tout le reste est utilisé pour établir un équilibre dynamique de l’écosystème ne serait-ce que par les exsudats racinaires qui nourrissent les micro-organismes du sol, par la couverture végétale qui permet l’entrée de l’azote dans le sol grâce aux fixateurs libres d’azote ou par l’évapotranspiration qui crée les cycles courts de l’eau dont les plantes ont besoin.
Ces 3 à 6 % d’énergie solaire qui créent la biomasse réalisent un merveilleux travail : ils nourrissent le sol en le couvrant et par les exsudats racinaires, nourrissent la vie du sol qui le travaille avec les racines sans oublier la production de nourriture de l’animal et de l’homme.
Pour réaliser maladroitement ce travail, l’homme est obligé de consommer une grande quantité d’énergie non renouvelable ; c’est pourquoi il devient impératif de s’inspirer du fonctionnement du système vivant pour améliorer l’efficacité et la résilience de nos systèmes techniques et socio-économiques.

Appliquons la thermodynamique à nos systèmes socio-économiques

Pourquoi pas !

À partir de 1h.05 https://www.youtube.com/watch?time_continue=1&v=5-qap1cQhGA
Il faut deux monnaies et deux revenus pour des usages différents ! (A écouter absolument, c’est la colonne vertébrale de cet article)
Chacun sait que si nous circulons en voiture ou si nous travaillons en tracteur sans source froide c’est à dire sans radiateur, il y a de forte chance que le moteur se détruise rapidement en quelques minutes.
Pour l’économie c’est pareil en peut-être plusieurs générations. Aujourd’hui il n’y a qu’une économie, celle du marché avec une seule monnaie et une seule espèce de revenu. Comment peut-on imaginer un instant que cela soit durable ?
Comme la chaleur du moteur sans radiateur (source froide) se concentre dans un endroit de celui-ci, sans « monnaie froide » dans notre économie capitaliste industrielle, il y a concentration monétaire dans les mains de quelques uns et les différences de revenu augmentent.
L’homme n’est pas fait que de logique, de concept à imaginer ou de rationnel, il est fait aussi de préjugés, de sentiments ou de ressentiments. Prises seulement sous l’angle des inégalités de revenus, ces considérations peuvent déboucher sur de sanglantes révolutions.
Cet article souligne également la nécessité de la réflexion thermodynamique qui permet d’éclairer l’esprit, de casser les cercles vicieux et peut-être de susciter un engouement chez le lecteur tout en sachant bien que le sujet est ardu et très peu enseigné, ce qui est une sévère lacune. On peut espérer que suite à la lecture de cet article, des lecteurs potentiels se mettent à l’étude de la thermodynamique des systèmes dit « hors équilibre ».

Comme le dit Konrad Schreiber : il faut les deux pieds (https://www.youtube.com/watch?v=WMT8CozX6wY dans les 11 premières minutes).
Au lieu d’évoquer les circuits courts et les circuits longs, nous pourrions parler d’économie de marché industriel avec l’euro (le dollar, le yen) comme « monnaie chaude » et d’économie solaire en autonomie individuelle avec les monnaies locales comme « monnaie froide ». Comme des opportunités se dégageront dans les deux types d’économie, il conviendra d’être actifs dans les deux types d’économie ; dès lors nous aurons besoin de deux revenus, l’un généré par les échanges de l’économie industrielle, l’autre un revenu d’autonomie (revenu de base) octroyé en monnaies locales qui permettra de construire l’autonomie individuelle (culturelle avant d’être matérielle) indispensable à ce nouveau paradigme (il y aura un prochain développement comprenant la composante agronomique).

L’AC, l’agro-écologie source d’inspiration pour ce nouveau paradigme

Et bien oui !

Quand Frédéric Thomas écrit un article comme celui-ci http://agriculture-de-conservation.com/Reprendre-la-main-sur-notre-communication.html il ne fait que l’apologie de notre autonomie culturelle.

Quand Cécile Waligora s’inquiétant de la disparition de la biodiversité nous dit de s’en remettre à notre conscience elle nous invite à participer à l’élaboration d’un système socio-économique plus résilient et plus efficace.

Quand Philippe Pastoureau s’inquiète à juste titre de la corrélation entre les performances printanières de ses PV et le cyclone Irma il met le doigt sur l’interdépendance de tous les systèmes qui gèrent notre monde . Soulignons aussi la « décompaction des cerveaux » qu’il met en évidence dans les débats,vidéos ou commentaires auxquels il participe.

On pourrait terminer en paraphrasant ce dernier qui disait :
"Rêvons d’un monde où l’agriculteur sera au cœur des équilibres naturels, vitaux à notre survie."
Redevenons tous des agriculteurs, de près ou de loin , en tout ou en partie au coeur de cette transformation socio-économique à venir en équilibre avec les lois de la biodiversité et de la thermodynamique.

Il est vrai que le sujet n’est pas digeste et n’est qu’au début de son développement, un prochain article tentera de mettre en évidence la présence déjà effective de certaines activités ou relations entre activités susceptibles d’entrer dans le canevas thermodynamique.
Je reste persuadé que même si le sujet n’est pas à la portée de monsieur et madame tout le monde, il reste néanmoins nécessaire et inévitable pour chacun d’entre nous de pouvoir l’appréhender si nous voulons que nos enfants et nos petits enfants puissent espérer un monde qui en vaut la peine.


5
septembre
2017

Portes ouvertes au jardin de Jupille

Les 26 et 27 août 2017, nous avons ouvert les portes de notre jardin. Mon rôle était de transmettre des informations concernant l’agroécologie, faire connaître l’agriculture de conservation et l’impérieuse nécessité de couvrir le sol.
Pour appuyer ma présentation j’ai réalisé un slake test : https://www.youtube.com/watch?v=2CQz9lKBdfg avec 4 types de sol :

Slake test
Slake test
Même slake test 1 semaine plus tard
Même slake test 1 semaine plus tard


Sur l’image de gauche, (l’image de droite sera décrite plus bas)
- celui de gauche étant un échantillon de l’agriculture industrielle qui n’a rien à voir avec le jardin.
- Le deuxième venant d’une parcelle bêchée de notre jardin collectif.
- Le troisième venant d’une parcelle non retournée mais non couverte.
- Celui de droite venant de ma parcelle en couverture permanente depuis deux ans.

Beaucoup de visiteurs ont été interpellés par cette petite expérience et très peu sont au courant de l’existence des pratiques en couverture de sol dans l’agriculture actuelle. D’ailleurs certains m’ont affirmé dogmatiquement que les agriculteurs ne voudront jamais pratiquer de la sorte. Quand je leur ai dit que c’était grâce à certains d’entre eux que cette petite expérience existe, leur certitude a quelque peu été ébranlée.

Echange d’idées

La première idée à décrire étant l’agroécologie, j’ai pris la forêt qui marque l’horizon du jardin comme exemple en expliquant qu’au début du siècle dernier les collines entourant la vallée étaient couvertes de cultures.
En abandonnant ces cultures qui n’étaient plus rentables pour l’agro-industrie, la forêt reprend ses droits d’où nous oscillons constamment entre forêts et prairies entretenues par les animaux.
L’agroécologie est le fait de se rapprocher le plus possible du système forestier qui ne travaille pas le sol, qui le couvre constamment et qui organise un maximum de biodiversité sans oublier le fait que les excréments des animaux doivent traverser le couvert avant d’atteindre le sol.
En dialoguant j’ai pu aussi constater que les idées reçues concernant la propreté du sol sont tenaces, « les mauvaises herbes » sont nos ennemies et dès lors, doivent être éliminées ; c’est ce qui est perçu par la plupart des jardiniers.
A ce sujet dans une partie de ma parcelle, j’étais envahi de liserons ; depuis deux ans j’enlève la partie aérienne que je mets en couvert avec d’autres plantes. N’étant plus alimentée en énergie solaire la réserve énergétique des rhizomes du liseron diminue et dès lors, il y a de moins en moins de reprises.
Je suis même persuadé que dans une première phase de construction d’un jardin des « couverts de mauvaises herbes » seraient bénéfiques mais c’est une autre expérience.
J’ai constaté également qu’un couvert de seigle peut avoir un effet bénéfique sur la diminution de la présence des liserons ; on peut penser que le pouvoir structurant des racines du seigle ralenti le développement des rhizomes du liseron, il faut savoir que les liserons poussent sur un sol trop compact. Mais bonne nouvelle : une personne m’a dit qu’il était plus facile d’enlever les mauvaises herbes quand le sol est couvert.

Par l’étude de la présentation de Konrad Schreiber https://www.youtube.com/watch?v=6kR3a6IP0Vg qui révèle que la décomposition de la paille sur le sol enclenche le cycle de l’azote tout en stockant du carbone dans le sol, il a été possible de mettre en évidence que la non couverture du sol interrompt le cycle du carbone par l’absence de la décomposition de la paille des résidus de culture de rapport ou de couverture.
Ceci est également valable pour le BRF (broyat de rameaux) : la décomposition de la lignine amène l’azote, j’en ai pour preuve cette culture de tomates (semences et plants faits maison) en serre derrière ma maison.
Tomates sous serre de M. Lambotte
Pour avoir autant de tomates (celles du dessous ont déjà été récoltées), il faut bien que l’azote vienne de quelque part alors que le sol n’a reçu que du BRF riche en carbone. On remarquera également aux pieds des tomates un couvert vivant à durée indéterminée de … aspérule odorante ; je l’ai légèrement recoupé et ai constaté que la paille est très dure, c’est un essai à poursuivre.
En parlant du cycle du carbone, j’ai aussi fait allusion au réchauffement climatique et au rapport quatre pour mille http://agriculture-de-conservation.com/INITIATIVE-4-POUR-1-000-DU-VERT-PARTOUT-ET-TOUT-LE-TEMPS.html

Pour en revenir au slake test, j’ai surtout insisté sur le fait que c’est le travail du sol qui est le plus préjudiciable à la vie du sol avant les engrais et les phytos en mentionnant l’étude danoise http://agriculture-de-conservation.com/Labourer-globalement-plus-nefaste-sur-la-vie-du-sol-que-les-pesticides.html. Cela ne constitue pas un plaidoyé pour Monsanto, c’est juste un argument supplémentaire pour la couverture du sol qui est la clé de voûte du futur système agricole.
J’ai aussi pu montrer la possibilité du pouvoir d’absorption de l’eau par le sol en cas de couverture. Dix litres d’eau versée en 10 secondes et complètement absorbée sur un demi mètre carré, suffit pour convaincre les plus récalcitrant et certains de me répondre : "Je commence à mieux comprendre le pourquoi des inondations" et de lui répondre : "et pourquoi l’eau est de couleur marron  ?"

Il paraît que ça va bien la vie.

Et bien oui elle revient, c’est l’objet de la photo de droite du slake test.
J’ai laissé traîner ces pots une semaine sur la planche, un plus cartésien que moi les aurait enlevé et rangé et n’aurait pas pu faire cette constatation.
On constate la présence d’algues dans l’eau : plus on se rapproche de la couverture du sol plus il y en a ; il faudrait vraiment faire preuve de mauvaise foi pour ne pas l’admettre.
C’est à étudier plus en détail mais cela prouve encore une fois qu’il faut toucher le sol le moins possible et le couvrir le plus possible.
On pourrait penser que c’est l’image du passage du minéral au biologique.

Prendre la main de notre communication

Cette initiative tend à montrer que la communication des agriculteurs vers le citoyen peut être aidée et appuyée par les citoyens eux-mêmes pour autant qu’elle aille dans le sens de la construction d’un sol vivant. C’est ce que j’essaye modestement de faire et toute initiative est la bienvenue dans ce sens pour autant qu’elle ne se drape pas de dogmatisme.
Nous n’utilisons aucun produit chimique sur notre jardin. Il serait vraiment mal venu de le faire d’autant que nous ne sommes pas soumis aux impératifs du marché dont j’ai fait allusion dans mon quatrième article.
Ce jardinage en couvert et sans aucun intrant révèle vraiment tous les défis de l’après pétrole qu’il nous faudra relever.
Je reste persuadé que l’agriculture peut se passer de la chimie à deux conditions : la première étant que dans tous les domaines agricoles on aille vers la couverture des sols, la deuxième étant de remettre en question les impératifs de notre civilisation mais nous ignorons encore que faire et comment le faire, il faut rester modeste. Je tenterai de développer ce thème dans une prochaine contribution en m’inspirant bien sûr de la sobriété de l’agriculture de conservation.

Plus nous serons nombreux à prendre la main de notre communication, plus de chance il y aura d’influencer le politique pour amener à subsidier le résultat plutôt que l’obligation (venant du pouvoir politique) d’actions qui ne sont pas toujours efficaces et que les agriculteurs chercheront à contourner. C’est très bien expliqué ici : http://agriculture-de-conservation.com/IMG/pdf/pdfsam_tcs93_recherche_biodivsol.pdf Si cette initiative est relayée par l’ensemble du réseau AC qui de toutes manières va s’étendre, cela devrait également essaimer vers des initiatives allant dans ce sens pour les autres secteurs de nos activités, tout en n’oubliant pas qu’il faudra faire la part entre l’utile et le superflu. Pourquoi ne pas subsidier les potagers collectifs qui vont dans la direction de l’agroécologie ?

Nous avons tous un rôle à jouer, il y va de la pérennité de notre maison la terre ainsi que de l’avenir des générations futures. Pour terminer, je voudrais vous faire écouter cette chanson de Gérard Lenorman qui me touche beaucoup https://www.youtube.com/watch?v=AYWxTqxWLks


27
juillet
2017

A nos consciences - Poursuite de la réflexion...

Dans son article "A nos consciences", Cécile Waligora écrit : "Les chercheurs appellent à réduire la croissance de la population humaine".

Pourquoi la croissance démographique ?

La première question qui me vient à l’esprit est de savoir pourquoi il y a croissance de la population humaine ? C’est très bien expliqué à la page 14 de ce document https://revolution-francaise.net/editions/wood.pdf
C’est l’agriculture qui a été responsable de cette croissance en profitant de l’amélioration des rendements grâce à l’introduction progressive du capitalisme agraire, qui, en « libérant » des paysans sans terres, ceux-ci ont pu rejoindre les rangs des travailleurs citadins.
Ces travailleurs citadins, sous les ordres d’une classe dirigeante, ont construit l’ère industrielle carburant à l’énergie fossile. Au sortir de la guerre 14-18, grâce aux nitrates, l’industrialisation de l’agriculture a été possible et de nouveau, les rendements ont augmenté et de là, créé le boom économique et démographique que nous connaissons ; avec ses conséquences néfastes décrites dans l’article de Cécile Waligora.

Loin de moi l’idée de bannir le capitalisme ; à mes yeux, il faut simplement le dépasser comme l’AC veut dépasser, sans détruire ses bienfaits, l’industrialisation de l’agriculture.
On peut résumer le capitalisme comme étant une triade entre un propriétaire des moyens de production (financier) un entrepreneur et des travailleurs. Tous sont soumis aux impératifs du marché, la rentabilité pour le financier, la compétitivité pour l’entrepreneur et la productivité pour les travailleurs. Dans le cas des indépendants, les rôles peuvent s’additionner pour une même personne.

En réinvestissant constamment les rentes, un tel système ne peut que croître indéfiniment.
Tant que le système de rentes, dividendes et intérêts existera, la croissance sera nécessaire, c’est très bien expliqué ici par Paul Jorion http://www.pauljorion.com/blog/2017/07/15/retranscription-pas-de-decroissance-sans-remise-en-question-de-la-propriete-privee-le-27-juillet-2014/
Il faut le savoir et en tenir compte pour inventer un autre système capable de dépasser ce paradoxe.
En ce domaine, l’AC, l’agroécologie, l’agriculture du carbone peuvent y contribuer.

Voilà enfin l’objet de ma contribution, la sobriété de l’agriculture de conservation pourrait peut-être contribuer à une nouvelle vision de la rentabilité de la compétitivité et de la productivité capable de résoudre les problèmes décrits dans l’article "A nos consciences". Transiter d’un moteur économique basé sur l’intérêt financier à un moteur économique basé sur l’intérêt de la sobriété.

La sobriété a un intérêt

Rencontre bout de champs en ACEt bien oui la sobriété a un intérêt, les agriculteurs qui pratiquent l’agriculture de conservation l’ont bien compris. Ils parviennent à cultiver avec moins d’intrants, moins de pesticides, moins de fuel.
Tout cela n’est possible qu’à condition de capter le maximum d’énergie venant de la photosynthèse qui va alimenter un système biologique qui pourra avantageusement remplacer ou transformer un ensemble d’outils. En quelque sorte on remplace du métal et du fuel par du biologique.
L’agriculture de conservation a les arguments adéquats pour aider à orienter vers la sobriété les décideurs habilités à changer les cadres juridique et économique de nos modes de vie.
Il nous faut par tous les moyens faire pression sur l’appareil politique pour infléchir les décisions vers la sobriété.
Cela n’est possible que si nous-même nous remettons en question notre propre vision du capitalisme et de ses conséquences. Nous ne pouvons pas éluder ces questions sous prétexte que cela nous éloigne des préoccupations de l’AC, il y va de notre avenir et celui des générations futures.
Beaucoup de jeunes font le choix de l’agriculture ; nous devons inventer un système économique capable de leur permettre de s’inscrire dans une agriculture durable.

Une simple question me vient à l’esprit : comment pouvoir investir l’épargne citoyenne dont l’intérêt financier est nul ou presque vers ce type d’agriculture ? La question sous-jacente étant de déterminer le type d’intérêt qu’il faudra instaurer étant donné qu’un intérêt purement financier nous fera retomber dans les mêmes travers capitalistes.
Comme le dit C. Waligora, si nous ne faisons rien ces désastres se retourneront contre nous, chacun doit contribuer aux solutions.
Sans prétention, cette contribution essaye d’élargir le champs de vision en tenant compte d’où nous venons, où nous sommes et où nous devrions aller.
George Bernard Shaw ne disait-il pas : Vous voyez les choses et vous dites : pourquoi ? Moi, je rêve de choses qui n’ont jamais existé et je dis : pourquoi pas ?