Une agriculture durable capable de relever les grands défis de l’humanité

Jean Le Douar, Ouest France - 16 décembre 2004

La conservation des sols c’est l’avenir

Quelle agriculture durable par les agriculteurs et pour la société ? Tel était le thème de la journée organisée par les associations Base et Apad (1) et qui a réuni plus de 160 personnes, hier, à Rennes. L’agriculture est au coeur du développement durable. Christian Pieri, de la Banque mondiale, en a bien présenté les enjeux : nourrir une planète dont la population mondiale ne cesse de croître, gérer un espace de plus en plus rare, préserver la ressource en eau, protéger la biodiversité des espèces animales et végétales, lutter contre l’émanation des gaz à effet de serre... Autrement dit, l’avenir de l’humanité se joue, en grande partie, dans les champs. " Or, poursuit cet agronome, l’agriculture conventionnelle est inspirée du mode industriel. Si elle produit beaucoup, elle gaspille aussi beaucoup d’énergie et d’eau, génère énormément de déchets et de pollution qu’on ne parvient plus à traiter et à maîtriser, rejette du C02 et appauvrit la biodiversité et la fertilité des sols. "

Or, l’agriculture de conservation des sols propose des solutions pour relever ces défis. " Il faut, explique Konrad Schreiber, agriculteur dans le Morbihan, passer d’un modèle fondé sur le credo d’une croissance linéaire, à une agriculture qui respecte les cycles naturels où ce qui vit, meurt, est recomposé et recyclé par le sol. " D’où l’importance de conserver le sol, d’en préserver la biomasse et d’y stocker le carbone qui est le vecteur de l’énergie, plutôt que de le rejeter dans l’air. "C’est le sol qui réorganise, poursuit-il. La condition de la durabilité est de créer une économie basée sur ces cycles complémentaires que les agriculteurs connaissent bien, car ils les voient à l’oeuvre dans la nature."

L’agriculture de conservation des sols repose sur trois éléments inséparables : la rotation des cultures, la couverture permanente des sols et le zéro labour. Elle donne aux agriculteurs de nouvelles raisons de travailler ensemble, de réduire leurs charges et d’explorer de nouvelles pistes : biocarburants, PVC biodégradable, production de cellulose et d’énergie renouvelable, etc., Par exemple, une couverture végétale permanente des terres régule les flux d’eau, régénère la biomasse, capte le carbone et le réinjecte dans le sol. Les prairies et les forêts sont les meilleurs stocks de carbone. Ainsi conduite, l’agriculture lutte contre le réchauffement de la planète. Il ne faut donc pas trop perturber le système en travaillant le sol, d’où l’intérêt du zéro labour qui préserve la biomasse et favorise la réorganisation et le recyclage de tous les déchets organiques.

(1) Base (Bretagne, agriculture, sol et environnement) ; Apad (Association française pour la promotion de l’agriculture durable).