Jusqu’où peut-on simplifier ?

Jérôme Labreuche - Perspectives Agricoles - n° 332, mars 2007

La suppression du labour reste possible dans la majorité des cas. Selon les cultures et la situation agronomique, il n’est pas possible de simplifier de la même manière les itinéraires. De nombreux essais de longue durée ont permis de tester la faisabilité d’itinéraires sans labour, allant du semis direct à ceux incluant du travail superficiel et un décompactage. Tour des principales cultures.

Le bilan de la simplification du travail du sol est très positif sur blé. C’est une des cultures qui s’y prête le mieux. Toutes situations confondues, sur 30 essais, un itinéraire avec travail superficiel affiche un rendement proche de 100 % de celui avec labour.

La période de semis des céréales d’hiver bénéficie d’une certaine humidité, favorable à la levée de la culture. Cela peut atténuer les conséquences de la présence de résidus végétaux dans le lit de semences. À l’opposé, les itinéraires avec labour tendent à créer dans des sols à tendance argileuse des lits de semences plus grossiers et moins favorables aux levées.

Dans le cas du semis direct, les levées peuvent être pénalisées quand les résidus végétaux sont mal répartis. Au-delà d’un certain seuil, le blé n’est plus capable de compenser cette hétérogénéité, malgré son extraordinaire capacité de tallage.

Une analyse des rendements obtenus dans 30 essais pérennes (de 3 à 36 ans) montre d’excellents résultats en implantations sans labour dans des terres à bon drainage.

Des terres humides à surveiller

En sol à ressuyage plus lent, un itinéraire avec travail superficiel (5 à 10 cm) est très légèrement pénalisé par rapport à un labour. La situation devient un peu plus critique au fur et à mesure que le travail du sol est réduit (semis direct) et le drainage de mauvaise qualité. Cela est encore aggravé dans des situations où le semis est tardif (mauvaises conditions de semis) ou précédé de tassement du sol à la récolte du précédent. La rotation, les dates de semis ou les dates de récolte peuvent constituer des voies d’adaptation. Certains agriculteurs ont aussi fait le choix, dans ces situations, de recourir à un décompactage léger (15 cm) utilisé en combiné à l’ensemble herse rotative + semoir, ce qui permet de corriger le tassement de sols à drainage lent. À noter que ces difficultés en sols à drainage lent ont aussi été observées dans des essais ayant duré plus de 10 ans, donc au-delà de la « phase de transition ».

L’orge est plus sensible à l’excès d’eau hivernal qu’un blé

Nous ne disposons que de très peu de références sur escourgeon- orge d’hiver. Cette culture se prête relativement bien à la simplification des itinéraires. Cependant, elle se montre plus délicate à implanter qu’un blé car elle apprécie moins les lits de semences creux ou pailleux. En sol à drainage hivernal moyen, la vigilance s’impose car cette culture est plus sensible à l’excès d’eau qu’un blé.

Le blé se prête bien au semis sous couvert

Les essais que nous avons pu réaliser sur blé ont montré qu’il se prête bien au semis sous couvert, sachant que la culture intermédiaire est encore verte, voire vivante lors du semis du blé. Les sols sont en effet en cours d’humectation à l’automne, ce qui fait que le couvert ne modifie pas trop les conditions de semis d’une céréale d’hiver. Semer dans des couverts verts nécessite par contre de disposer d’un semoir qui « passe » dans les débris végétaux (dégagement pour ne pas bourrer, éléments semeurs permettant de positionner correctement les semences malgré les résidus du couvert, fermeture du sillon avec un sol cousu de racines…). Les limaces ne sont pas trop problématiques car si elles sont présentes, elles ont tendance à encore consommer la végétation du couvert.


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