Jeudi 23 août 2018
Pierre-Moran Mouchard

Première expérience de conduite en plein air intégral

Suite à son BTS ACSE et une licence conseil en élevage, passionné par l’élevage ovin, Thomas a pris la direction de l’Australie et les « sheep station », fleuron de l’industrie lainière australienne. C’est pendant une année qu’il a pu se former au contact d’un troupeau de 20 000 brebis mérinos conduit en plein air intégral dans l’Outback australien. À la suite de cette expérience, deux choses l’on frappé : La première étant la qualité de vie des éleveurs, « on peut être éleveur et faire du ski nautique le week end » se souvient-il en esquissant un sourire. Et la seconde, la conduite en plein air intégral du troupeau, dans un milieu sec.
A son retour en France, l’opportunité s’offre à lui de s’installer, lui permettant de travailler sur la ferme familiale située dans l’ouest de l’Aube. L’exploitation présente diverses activités, puisqu’elle s’étend sur 160 ha dont 11 ha de prairie permanente et le reste en grandes cultures (en conversion vers l’agriculture biologique), 900 brebis Ile de France en système semi bergerie (agnelage, lactation et engraissement des agneaux en bâtiment), engraissement de taurillons, méthanisation, entreprise de pressage et commerce de luzerne et paille. Thomas prend très vite la main sur la partie élevage.

Pâturage de précision

Jusque-là, les prairies étaient gérées en 4 paddocks d’une semaine, entrainant un sous pâturage d’un côté de la prairie et un surpâturage de l’autre. Cherchant à améliorer la productivité de ses prairies, il tombe rapidement sur la technique de pâturage de précision (aussi appelé pâturage tournant dynamique), qu’il met en place sur ces 11ha destinés au troupeau ovin Ile de France. Pour se faire accompagner, il fait appel à PatureSens. Après l’intervention d’un consultant sur son exploitation, il rejoint le groupe de formation pâturage de son département de l’Aube afin d’apprendre et d’échanger sur la gestion du pâturage.
La mise en place du pâturage de précision a eu lieu dès le printemps 2017, en système techno-pâturage. Des couloirs de 50m en high tensile sont tirés dans la parcelle de façon à faire un système de fil avant fil arrière, permettant de faire varier la taille du paddock au jour le jour en fonction des besoins du troupeau, du couvert d’entrée et du temps de présence souhaité (24h/48h/72h).

Pâturage des couverts végétaux

Couverts végétaux composés principalement de vesce, de radis, de phacélie et de chou fourrager
Couverts végétaux composés principalement de vesce, de radis, de phacélie et de chou fourrager

C’est également en 2017 qu’il pâture pour la première fois des couverts végétaux, composés principalement de vesce, de radis, de phacélie et de chou fourrager, à l’automne avec son troupeau d’île de France devant agneler à partir de fin novembre. Après une entrée tardive (disponibilité des clôtures) au 22 septembre, les brebis sont restées dans les couverts jusqu’à ce que les premières brebis agnellent. JPEG - 120.5 ko
Hormis les brebis âgées ayant 2 ou 3 agneaux qui ont eu du mal à se tenir en état et quelques boiteries, Thomas est satisfait du résultat, puisqu’avec autant d’animaux au pâturage, les coûts de production et le temps de travail se réduisent. Il changera une chose pour l’année suivante : la conduite du pâturage. Jusqu’ici en 5-6 jours par paddock dans les couverts, il prévoit de passer à du 24h ou 48h par paddock afin de maximiser les performances animales.

Une troupe en plein air intégral

Brebis en plein air intégral
Brebis en plein air intégral

2017 aura été une année de changement, avec l’arrivée d’une nouvelle troupe dans un système complètement différent. L’opportunité de pâturer des prairies chez un voisin en agriculture biologique lui a permis de mettre en place une troupe de brebis en plein air intégral, permettant à l’exploitation d’essayer ce système sans mobiliser sur ses surfaces. Après quelques imprévus, les 95 agnelles de race Wairere Romney sont arrivées tardivement, fin novembre. Rapidement elles ont rejoint les couverts végétaux jusqu’au 19 janvier. Conduites en 24h par paddock, la croissance a été limitée par les mauvaises conditions météo et le fait qu’elles n’ont pas été tondues avant l’hiver (150gr de gain moyen quotidien mesuré sur la période de pâturage des couverts). Elles ont ensuite rejoint les prairies permanentes non pâturées depuis juillet afin de consommer le stock d’herbe sur pied avant le printemps. Malgré la pluie de l’hiver 2017-2018, les brebis n’ont pas souffert (pas de boiterie et croissance maintenue) d’être en plein air. Bien que les brebis aient piétiné les prairies, celles-ci sont reparties de plus belle en fin d’hiver. Quelques semaines avant l’agnelage, les Wairere Romney ont rejoint leur parcelle attitrée, toujours conduite en techno-pâturage.

Résultats mitigés mais une technique à poursuivre

Les résultats techniques de reproduction du troupeau ont été plutôt moyens. Les agnelles étant arrivées tardivement et certaines d’entre elles trop légères ; la fertilité s’élève à 60%, puisque les plus petites n’ont pas été fécondées. L’agnelage a eu lieu fin avril début mai avec une mortalité agneaux légèrement plus élevée que prévu (25% de mortalité sur les agneaux), tout en gardant en tête que le troupeau est uniquement composé d’agnelles (1er agnelage). La cause principale de mortalité a été le poids trop faible des agneaux à la naissance entrainant un manque de vigueur de leur part. Toutefois, une seule intervention a été nécessaire (1 gros simple coincé), ce qui est un point positif pour un agnelage en extérieur.
Les associés du GAEC sont satisfaits par ce nouvel atelier, permettant d’accroitre le troupeau ovin sans une grosse augmentation de la charge de travail, dans le système plein air contrairement au troupeau conduit en semi bergerie. A l’automne prochain, ce seront 230 agnelles et brebis Romney qui seront mises en lutte en combinant pâturage de couvert à l’automne et hiver et pâturage de prairie le reste du temps. L’agnelage sera avancé à fin mars début avril afin de profiter de la forte production des prairies du printemps pour couvrir les besoins de lactation, et finir les agneaux à l’herbe pendant l’été, sur ces même prairies ou sur de la luzerne, suivant la pousse estivale.

Pâturage tournant dynamique
Pâturage tournant dynamique