Jeudi 19 mai 2016
Thierry Stokkermans

Originaire du Sud-Ouest de la France, Thierry STOKKERMANS a travaillé en Espagne, Nouvelle-Zélande et Australie avant de s’installer aux Pays-Bas. Convaincu par le semis direct à faible perturbation, il conçoit et développe aujourd’hui des machines agricoles (zip drill).

Evolution des sols : les électrons libres ne sont pas anodins

Les électrons sont partout car ils sont un des trois éléments constituant les atomes et trouvent un grand nombre d’utilisations. Certains les récoltent dans le sol pour les vendre. D’autres les utilisent pour fabriquer des rochers artificiels en attrapant les particules fines. Et cela mène à la question : quels sont leurs effets sur l’évolution des sols agricoles à court, moyen et long terme ?
Il est connu que l’activité biologique génère des réactions chimiques et, par conséquent, des échanges d’électrons (figure 1).
Activité biologique et électrons
Dans le contexte des énergies renouvelables, une Start Up Néerlandaise nommée Plant-e a décidé de récolter les électrons et de les vendre. Ils vendent donc de l’électricité issue directement de l’activité biologique.
L’idée est simple : faire pousser des plantes pour générer des processus chimiques et récolter l’électricité. Aujourd’hui pour récolter l’électricité facilement, ils travaillent dans des milieux aquatiques peu profonds tels que les rizières, les marais et certains toits végétalisés (figure 2).
Le principe électrique Plant-e
En effet, l’eau de ces milieux est conductrice d’électricité et cela limite le nombre d’Anodes et de Cathodes à placer. Les quantités d’électricité récoltées sont relativement faibles. A titre indicatif, le système peut équiper un jardin pour l’éclairer la nuit (par conséquent le jardin s’auto-éclaire). L’entreprise présente la technologie plutôt comme un générateur de revenu secondaire, par exemple pour les cultivateurs de riz en Asie ou pour réduire l’empreinte Carbone tel l’éclairage de jardins publics.
C’est un procédé intéressant et amusant. Mais ce n’est pas le seul procédé qui travaille sur les électrons dans les milieux aquatiques. Comme vous le savez, l’érosion du littoral est un problème d’actualité et la startup française GeoCorail a décidé de s’y attaquer … avec de l’électricité. En effet, ils font circuler de l’électricité à travers un grillage/maillage-de-fil immergé (figure 3) et créent des roches artificielles au large qui protègent le littoral.
Le principe électrique GeoCorail
En effet, lorsqu’ils font passer le courant électrique, les particules fines en suspension viennent s’accrocher sur la structure en formant des liaisons fortes et en additionnant les particules fines et les liaisons fortes, l’entreprise obtient des rochers artificiels pour protéger le littoral. En France, La Rochelle possède un tel rocher.
En agriculture, il est très peu, voire pas du tout, question d’électricité dans le sol. Pourtant il y en a. L’activité biologique génère des processus chimiques qui font s’échanger les électrons mais aussi, le travail mécanique génère du frottement qui, à son tour, libère des électrons. Par exemple, un soc, une dent ou un versoir frottent le sol et libèrent des électrons (figure 4).
Production d'électrons par le travail mécanique
Donc en agriculture, il y a des phénomènes électriques dans le sol. Ils semblent à priori faibles mais néanmoins suffisamment grands pour qu’une entreprise d’énergies nouvelle s’y intéresse. Et, sous certaines conditions, l’électricité et les éléments fins peuvent former des liaisons fortes et par conséquent de la roche. En conclusion, il faut admettre qu’il y a peu de choses connues sur l’effet de l’électricité sur le sol et son évolution à court, moyen ou long terme. Néanmoins, il est intéressant de garder ce « petit-savoir » à l’esprit car il peut être utile pour vérifier, expliquer et quantifier des processus de dégradation ou d’aggradation des sols agricoles.