Vendredi 4 mars 2016
Philippe Pastoureau

Éleveur dans la Sarthe et ACiste reconnu, Philippe PASTOUREAU multiplie les essais, toujours à la recherche d’amélioration. Rédacteur de longue date sur A2C, il relate ses expériences : un véritable appui technique et un vrai régal à lire !

Pister les pionniers pour ne pas être largué

La Cuma des Mimosas accueillit par la Cuma de Piacé.

C’est en période de crise qu’il faut investir, pas forcément dans de la ferraille, mais plutôt dans des systèmes durables et performants. Pour ma part, encore une fois, j’ai la chance d’avoir des voisins qui n’ont pas peur d’innover, et depuis 2 ans nous avons modifié nos pratiques pour aujourd’hui nourrir nos bovins au moindre coût, et j’espère durablement.
Anton Sidler (LVH) nous a ouvert son étable et a ouvert nos esprits en même temps, ceci nous a conduit snaturellement à mettre en place sur nos fermes une agriculture autonome et rentable.
Autant vous dire qu’aujourd’hui, j’ai encore de l’espoir dans la production laitière car je suis tout doucement en train de mettre cette production en symbiose avec le reste de ma ferme.

Adapter ses pratiques pour plus d’autonomie
La luzerne et les prairies multi-espèces sont donc arrivées dans mes champs pour remplacer le maïs ensilage qui rime trop avec esclavage, les mélanges RGI-trêfle montent en puissance et les dérobées de 6 mois vont progressivement laisser la place à des dérobées de 18 mois et des méteils.
Beaucoup de changements se sont mis en place depuis 2 ans, il a fallu se documenter, se former, visiter des pionniers et assumer les erreurs du débutant, mais notre orientation se consolide de jour en jour, notre autonomie ne cesse d’augmenter au grand désespoir des vendeurs de chimie ou d’aliments, et le moral se renforce en cette période où beaucoup trop d’éleveurs jettent l’éponge, preuve que notre système conventionnel n’est pas durable.
Je dis par là, que comme pour les sols, il y a un moment où le paysan doit regarder son outil de travail (la vache en l’occurrence), et faire preuve de bon sens. Lui seul a le pouvoir de changer son mode de production, comme le non labour, aucun vendeur n’a d’intérêt à ce que vous évoluiez vers l’autonomie.
Attention toutefois, comme pour le non labour, il n’y a pas de place à l’improvisation, et il faut connaître les règles de base pour avoir rapidement des bénéfices.

Sol en Santé, Animaux en Santé, Paysan en Santé...
Avant, je produisais du fourrage avec mon maïs ensilage, fourrage riche en énergie que je complétais avec l’achat de soja riche en protéines. Pour avoir une vision simple de l’alimentation laitière classique, il faut 1,5 tonnes de soja pour 1 ha d’ensilage de maïs plante entière.
1 ha de maïs ensilage nécessite 350 € d’intrants, plus 1,5 t. de soja que le commercial vous vendra également soit environ 800 € d’intrants pour 1 ha de maïs, tarif très volatil...

Maintenant, je cherche à produire le maximum de lait avec mes fourrages que je vais chercher à équilibrer à l’auge (passage à une ration mélangée) et être beaucoup moins dépendant des intrants.
La ration va progressivement évoluer pour tendre vers 1/3 de maïs plante entière (fauché très haut), 1/3 de luzerne plus 1/3 de prairies multi-espèces. À ceci viennent s’ajouter 6 à 7 kg de maïs épis plus un concentré fermier (orge-maïs aplati) distribué au robot.
D’une ration simple auparavant (maïs-soja-concentré de production), je vais passer à une ration multi espèces qui va multiplier les chantiers de récolte, les lieux de stockage et la manipulation pour la distribution. Ceci va nécessiter des investissements qu’il convient de chiffrer avant le changement d’alimentation, mais comme la charrue, le plus dur est de changer la manière de voir, et lorsque l’on a basculé vers l’autonomie, les discours des vendeurs ne sonnent plus du tout de la même façon.

Voici quelques articles trouvés sur le net :
- protéine maison au menu
- Témoignage de Gonzague Jouzel
- Ensilages d’herbe, de méteil et d’épis de maïs se complètent à l’EARL de Lanzéon
- arrêter l’ensilage de maïs tout en maintenant ses vaches à 10 000 litres

Voici des vidéos explicatives :
- Anton Sidler, agricultureautonomerentable.fr.

- 

Mickaël Sergent, Clasel72.

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Un système fourrager gagnant-gagnant

Vidéo complète disponible à la vente sur le site agrovidéo

Dans un prochain article, je vous détaillerai les chantiers de récolte mais aussi les modifications apportées pour le stockage, un petit rationneur pour équilibrer la RTM (ration totale mélangée) mais aussi des indicateurs pour prévoir les surfaces nécessaires en fourrage, cuber les silos et dimensionner les fronts d’attaque.
(Le plus urgent pour vous est maintenant de savoir si vous devez semer du maïs ???,
ensilage ou épis ??? ou garder le dérobé un peu plus longtemps ???
)

Désolé pour ces questions, courage !