Samedi 30 mars 2013
Christophe Barbot

Conseiller en agronomie à la Chambre d’Agriculture d’Alsace.
Pour Christophe BARBOT, les matières organiques du sol n’ont presque plus de secrets. Travaillant près de Strasbourg, il observe aussi ce que font nos voisins germanophones, Suisses, Autrichiens ou Allemands.

Les pouvoirs époustouflants des « microbes »

Les microbes ne sont pas que des parasites, mais ils sont aussi à la source de la « vie » sur la Terre : ces microscopiques organismes ont façonné très longtemps notre planète.

Un numéro Hors Série de Science et Vie ( HS n°261) m’a appris que les bactéries tirent les ficelles de l’évolution des espèces vivantes, faisant alliance avec les « macrobes », comme les plantes ou les animaux.

A notre insu, les bactéries oeuvrent en nous par milliards, pour notre bien, infatiguables ouvrières. Les bactéries ont induit l’oxydation de l’atmosphère avec de l’oxygène, les glaciations et les réchauffements sur la Terre. Ce sont des chimistes hors pair. Ce que la microbiologie est en train de révéler ces dernières années grâce à la puissance des analyses d’ADN, c’est l’omniprésence dans tout le vivant de symbioses avec les bactéries.

Les pucerons ont un régime, la sève, très pauvre en protéines. Ils ont formé de véritables organes, nommés "bactériomes", peuplés de cellules spéciales conçues pour héberger des bactéries symbiotiques qui ne vivent que dans le puceron : buchnera aphidicola. Ces bactéries spécifiques synthétisent tous les acides aminés pour leur hôte. Les bactéries sont transmises à la descendance via l’œuf du puceron.

Les plantes sont inextricablement liées au monde bactérien du sol Elles sont arrivées à les loger dans des organes spéciaux, les nodosités, abritant les Rhizobium où est optimisé la production d’ammoniaque à partir de gaz azote de l’air. La synthèse d’une protéine complexe, la leghémoglobine qui est capable de réguler l’oxydation en absorbant l’oxygène, pour raréfier l’oxygène dans le milieu car le Rhizobium ne supporte pas des concentrations élevées en oxygène. Fait remarquable, les gènes qui permettent la synthèse de cette protéine sont répartis entre la plante et la bactérie : l’évolution a fortement intriqué les génomes !

L’adaptation microbienne des plantes à la sécheresse

Une étude publiée en juillet 2012, par Jen Lau biologiste de l’université du Michigan, suggère qu’en cas de changement brusque des conditions (sécheresse, …) la ligne première d’adaptation de la végétation est microbienne !

Les chercheurs ont exposé des plantes de la famille de la moutarde à la sécheresse en les plantant dans deux types de sol : un qui était toujours resté dans l’humidité, et l’autre qui avait été soumis à des épisodes secs répétés durant trois ans, soit 50000 duplications de bactéries, mais seulement 3 générations de plantes annuelles. La production de fruits fut sensiblement plus élevée lorsque le sol (et ses microbes) avait été « habitués » au manque d’eau ! Mais la plante elle-même n’avait pas évolué. Ainsi des partenariats se nouent entre les plantes et les microbes pour des bénéfices communs.

Brassica Rapa en conditions sèches et humides.

crédit photo : Research in the Lau lab : www.msu.edu/~jenlau/

L’étude publiée aux Etats-Unis : http://www.pnas.org/content/early/2012/08/08/1202319109.full.pdf

Allons à la rencontre des microbiologistes.... pour mieux cerner les relations sol-plante-climat.

Pour ceux qui lisent l’anglais : http://msutoday.msu.edu/news/2012/impulsive-micromanagers-help-plants-to-adapt-survive/