Après deux années et
environ 50 machines en
fonctionnement réparties sur
l’ensemble du territoire et en
Allemagne, Cyrill Genest, agriculteur
dans le Lot-et-Garonne
et importateur des éléments
américains, a décidé de revoir
la machine afin de l’adapter
aux conditions et demandes
particulières françaises.
« Sans modifier l’équilibre et le
fonctionnement des éléments qui
ont largement fait leurs preuves
aux États-Unis mais aussi chez
nous dans des types de sols très
divers avec souvent des couverts,
il nous fallait augmenter le rappui
à l’arrière pour éviter de laisser
un sol creux mais aussi limiter la
largeur de travail », signale Victor
Leforestier (le technicien
démonstrateur de Strip-Cat).
« On recherchait également des
éléments plus légers, plus effilés
pour mieux passer dans les couverts
mais aussi intervenir en colza
et en betterave à 45-50 cm d’écartement
entre rangs, complète-t-il.
Enfin, rapatrier la construction
en France permet de réduire et de
stabiliser les coûts de production,
de passer toute la boulonnerie,
la visserie et les articulations en
système métrique avec des pièces
comme les roulements et flexibles
aux standards européens facilement
trouvables localement par
les utilisateurs si besoin. »
Pour répondre à ce cahier des
charges, en plus du relookage
réussi du bâti, plusieurs transformations
fondamentales ont
été intégrées :
Les ressorts de pression ont été remplacés par des « poumons »
pneumatiques. Ils répondent sans vibrations, sont plus souples,
plus légers et limitent
les articulations et pièces en
mouvement tout en facilitant
les réglages. En fait, la poutre
centrale est transformée en réserve
d’air comprimé qu’il suffit
de remplir à la ferme. Ensuite,
grâce à un système de vannes,
il est simple d’ajouter ou bien
de retirer du système de la pression
que l’on peut suivre par un
manomètre. Ce dispositif, qui
équipe aussi les roues arrières,
donne la possibilité de transférer
plus de poids pour apporter
suffisamment de fermeté à la
zone travaillée si besoin ;
La partie travaillante de la
dent, qui est largement validée,
a été conservée mais le
support a été revu afin d’autoriser
des réglages de profondeur
d’intervention de 2,5 cm en
2,5 cm assez faciles à réaliser à
l’aide d’une broche. Ce type de
montage permet également de
retirer complètement la dent
si nécessaire. Cette astuce préfigure
l’objectif de Strip-Cat
France, qui est de développer
d’autres outils pouvant se fixer
au même endroit pour des utilisations
spécifiques : les reprises
de printemps ou l’incorporation
de lisier par exemple. Comme
sur la version d’origine, la dent
peut soit être non-stop hydraulique
ou en sécurité boulon.
Cependant la sécurité non-stop
est toujours réadaptable sur les
machines laissant plus de liberté
dans les choix d’investissement
;
Un gros effort a également été
réalisé sur les disques qui encadrent
la dent afin de limiter les
projections, de mieux conserver
la terre sur la zone travaillée
voire de former une vraie « micro-
butte ». Avec cette nouvelle
version, les disques peuvent
être avancés ou reculés par rapport
à la dent (réglage plutôt
d’atelier en fonction du type
de sol), plus ou moins écartés
grâce à des entretoises en téflon
interchangeables (réglage en
fonction de la culture et de la
stratégie d’intervention) et enfin
réglables en inclinaison afin
de ramener plus ou moins de
terre sur la zone travaillée ;
Enfin, et toujours dans cette quête de polyvalence et d’efficacité,
Strip-Cat propose
l’adaptation d’un ou deux disques-
rasettes de semis avec roue
de rappui à l’arrière des roues
plombeuses afin de positionner
simplement un colza en un seul
passage sans avoir recours à un
semoir monograine ou implanter
un couvert végétal sur la
ligne dans le cas du Strip-till
végétal. En fonctionnant avec
deux lignes, cela devrait apporter
une meilleure couverture
et permettre de contourner les
difficultés que certains ont rencontrées
pour ressemer le maïs
juste sur la ligne notamment
avec de la féverole.
Strip-tiller et localiser du lisier en un seul passage
L’association Base en collaboration avec le Ceta 35 et la FDCuma 35 a organisé le 20 juin sa seconde rencontre annuelle sur le strip-till à Piré-sur-Seiche en Ille-et-Vilaine (35). Au milieu des interventions, des témoignages et des visites d’essais, c’est l’agriculteur allemand, Anton Hirl qui a apporté l’information la plus déterminante. Depuis 5 ans, il pratique et teste avec différentes universités allemandes l’incorporation de lisier et digestat avec le strip-till. Il n’y a pas de contradiction bien au contraire mais pour que cela fonctionne, les produits organiques doivent être incorporés entre 10 et 15 cm en dessous de la zone de positionnement de la graine et au moins 8 à 10 jours avant le semis de maïs pour leur laisser le temps de diffuser dans le sol. « Sitôt l’incorporation, le sol est un peu "bouteux" en dessous, il faut surtout attendre sans intervenir et laisser la zone se réorganiser. Lorsque le semis est possible en surface, cela signifie également que le produit a commencé à se répartir correctement dans le profil », assure l’agriculteur. De manière courante, il injecte environ 20 m3/ha de lisier mais il signale qu’il est possible de monter jusqu’à 30 et même 40 m3/ha. Cependant et encore plus qu’avec seulement le striptill, ce type de combinaison ne peut être envisageable que sur des sols bien organisés avec un certain recul TCS. En complément, cette approche innovante ou plutôt cette complémentarité permet de résoudre habilement la question épineuse de l’incorporation des lisiers en AC, de fortement limiter les pertes par volatilisation comme les odeurs et de nettement améliorer leur efficacité, mais encore de localiser les passages de roues qui sont toujours très préjudiciables pour la structure du sol au printemps. Seule difficulté : la puissance exigée pour un ensemble tonne + strip-tiller et l’organisation autour du chantier. À ce titre, l’Allemagne, comme beaucoup de pays du Nord, semble plus en avance avec un transport de type routier jusque dans des cuves tampon de bout de champs dans lesquelles viennent s’approvisionner les outils d’épandage. Une logistique certainement plus efficace qu’il faudra penser à mettre en place si l’injection de lisier avec un strip-tiller se développe dans les régions d’élevage et chez les agriculteurs méthaniseurs. Encore une fois, en apportant des solutions aux difficultés rencontrées mais aussi de nouvelles perspectives comme ici avec le lisier, le strip-till est vraiment une approche qui va soutenir activement le développement de l’AC en France.