Agritechnica, Bioénergies et TCS

Jim Bullock - TCS n°35, novembre / décembre 2005

Lors du dernier Agritechnica qui s’est tenu à Hanovre le mois dernier, les bioénergies étaient l’attraction phare, grouillant d’innovations. C’est aujourd’hui une véritable filière encouragée en Allemagne comme dans d’autres pays européens et c’est déjà une vraie réalité, les agriculteurs produisent du maïs pour fabriquer du biogaz, du colza pour de l’huile ou du biodiesel tout en utilisant le tourteau pour se chauffer et encore le blé et la betterave prennent la direction du bioéthanol. Cet événement, spécialisé dans le machinisme agricole a cependant permis de découvrir un nombre important de machines pour les TCS et le semis direct affichant une réduction des coûts et une meilleure préservation de l’environnement. Enfin, le GKB, l’association allemande affiliée à l’Ecaf (European conservation agriculture federation), était bien représentée et supportée par de nombreux experts sur la gestion des sols.

Ce Salon rassemblait de gigantesques machines, souvent d’origines américaine et canadienne, destinées davantage à un public des pays de l’Est. Avec 18 m de large, les semoirs présentés par Morris, Hazenbilcher et Horsch demandent une puissance de traction d’au moins 500 CV et se replient seulement en module de 5 m ce qui les rend complètement inutilisables dans la plupart des exploitations de l’Ouest.

Tous ces pays développent des systèmes de production où la préservation de l’humidité du sol est la principale préoccupation avec des rendements actuels encore très bas (10 q/ha). La majorité apporte également l’engrais en même temps que la semence ce qui devrait permettre d’améliorer les résultats techniques dans des sols où la fertilisation a été traditionnellement faible voire inexistante. Toujours dans cette gamme mais intermédiaire, Amazone présentait un semoir à disques de 12 m de large : le Citan. L’approche TCS la plus communément développée par les constructeurs allemands aujourd’hui s’articule autour d’un double déchaumage. Le premier est réalisé le plus tôt possible après la récolte sur une épaisseur inférieure à 7-8 cm. L’objectif est d’incorporer légèrement les pailles et de promouvoir la levée des adventices et repousses. Les outils à disques indépendants de type Rubin (Lemken) ou Catros (Amazone) sont les plus communément utilisés pour cette intervention. Une fois la parcelle « reverdie » mais avant que le sol n’ait repris de l’humidité, le second passage est réalisé à 20-25 cm, plutôt avec des outils à dents comme le Tiger (Horsch) ou le Cultus (Väderstad) afin de détruire la végétation en place, mélanger les pailles dans le profil et ameublir la surface sans créer de zone de rupture. Ensuite, le semoir le plus largement représenté comprend à l’avant une double rangée de disques indépendants suivie d’un rouleau packer sur la totalité de la largeur afin de supporter la machine et raffermir le sol derrière lequel est positionnée la graine grâce à un système double disque. Ces types de semoirs qui peuvent travailler sur différents niveaux de déchaumage voire en labour sont, par leur polyvalence et débit de chantier, l’option la plus commune outre-Rhin.

Intégrant cette mouvance, le semoir le plus intéressant était le Spirit de chez Väderstad, une machine qui est d’un concept complètement nouveau pour l’entreprise. Le Spirit est non seulement une rupture avec l’approche « Rapid », mais il semblerait que ce concept ouvre la voie à un système de « module porteur » utilisable pour des outils plus larges voire avec des éléments monograines. La machine présentée était équipée du classique « système disque » à l’avant suivi d’une barre de nivelage et d’un packer à pneus qui se désaccouple pour le transport sur route. Ensuite, un double disque original rassemblant de nombreuses innovations assure le placement de la graine. Un système de roulements (breveté) permet de rattraper automatiquement l’usure des disques afin de conserver un travail optimum dans le temps. L’intérieur est également équipé d’un racloir lui aussi autoajustable. Enfin, la roue de jauge peut être réglée pour fournir un rappui sur la totalité de la largeur de la ligne de semis (75 mm) ou seulement sur le bord du sillon en cas de risques de battance ou de glaçage. Présenté comme très polyvalent, il n’est pas impossible que ce nouveau semoir cherche à réaliser le grand écart entre labour et semis direct. Enfin, proposé pour des largeurs comprises entre 4 et 9m, il ne sera pas disponible dans l’immédiat en France. En complément de ces équipements plutôt « TCS », de nombreux constructeurs présentaient aussi des semoirs de semis direct en provenance d’Argentine et du Brésil. Ce type de machines semble plus intéresser le sud de l’Europe où la couverture du sol, pour limiter l’évaporation du peu d’eau disponible, est incontournable. Certains tels que Stara Sfil (www.starasfil.ind.br) présentaient des machines basiques et d’autres plus complexes capables de semer toutes sortes de cultures entre les prairies, les céréales, le maïs et le soja.

Dans cette même catégorie, Kuhn dévoilait son semoir de semis direct en provenance de sa filiale brésilienne (www.kuhnmetasa.com). Le SDM est pour l’instant commercialisé en Espagne mais devrait prochainement devenir disponible dans tous les pays. Cette machine permet de semer des céréales d’automne avec un écartement réduit de 170 mm et peut passer à 340 mm en cultures de printemps. Elle paraît très bien conçue avec des trémies en fibre de verre qui peuvent être subdivisées pour recevoir également de l’engrais. La fertilisation peut quant à elle être positionnée devant ou derrière les disques semeurs et en fonction du type de sol, des conditions et des cultures, le constructeur propose une panoplie de roues de fermeture et de rappui afin d’adapter l’outil et surtout le travail à toutes les exigences. Cependant, le positionnement de roues à l’extérieur du semoir reste un handicap pour le marché européen. Kuhn propose tout de même un système de transport en long pour les machines les plus larges.

Enfin Bioland, l’une des principales organisations allemandes « bio », avait un grand stand sur lequel étaient présentés des systèmes de mélanges de cultures très intéressants pour ceux impliqués en production biologique mais également pour les agriculteurs pratiquant l’agriculture de conservation. À ce titre, l’association a développé, avec le constructeur Heko, un semoir qui permet le semis de deux cultures simultanément à des profondeurs et dosages différents. L’une des combinaisons mises en avant était l’association de pois de printemps et de la caméline (ancien oléagineux). L’objectif est d’utiliser la vitesse de développement et l’allélopathie de la caméline pour gérer le salissement pendant que le pois s’installe. À la récolte, le rendement du pois n’est pas affecté et, de plus, il est possible en conditions « bio » de récupérer 300 kg/ha de caméline très facile à trier au vu de la différence de taille entre graines. Affaire à suivre…


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