Jeudi 11 février 2021
Opaline LYSIAK

Après 5 années d’enseignement en lycée agricole, Opaline réalise un Tour du Monde et parcourt 12 pays en 12 mois : « Enseigner autrement l’Agroécologie". Elle crée l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse, qui a accompagné 42 personnes à apprendre l’agroécologie en voyageant dans les fermes et trouver leur place dans le monde paysan et du Vivant.

Maïs : les résultats des corridors solaires

En mars 2020, je publiais un article sur les corridors solaires, techniques développée en Amérique du Nord depuis 2010 avec des résultats épatants et représentant une énorme opportunité sur la séquestration de carbone. Cette année, 3 agriculteurs bretons du réseau BASE ont mis en place l’essai.

Si vous souhaitez mettre en place l’essai dans votre ferme, vous pouvez remplir ce formulaire.

En doublant la largeur de l’espace entre deux rangs de maïs et en densifiant les pieds sur le rang (passant de 75 à 150 cm d’écartement), on peut intégrer un couvert végétal qui apporte de nombreuses fonctionnalités : structuration du sol, apport de matière organique, accueil de biodiversité fonctionnelle, maintien de l’humidité au sol, limitation du développement de plantes non désirées.

La créativité, leitmotiv de l’essai

La technique est testée depuis 2010 en Amérique du Nord. Elle a été testée pour la première fois en France en 2020 chez 3 agriculteurs bretons - Bertrand Paumier, Nicolas Gorin et Pierre-Henri Hamon, avec un suivi de projet inter-générationnel et collaboratif, et un objectif de valorisation et de partage des expériences tout au long de l’essai.

Couvert biomax dans un corridor solaire : le couvert a été roulé avant floraison

Les moyens financiers pour suivre l’essai sont accordés par la Région Bretagne à travers le projet Agriculture Écologiquement Performante (AEP). Le choix a été fait de confier le suivi et la valorisation du projet à l’association les Agron’Hommes : j’ai coordonné l’essai et fait appel à Solène Mure, étudiante ingénieure agronome, pour le suivi de l’essai sur le terrain pendant 2 mois. Pour cette expérimentation unique, le choix a été fait de laisser une grande liberté et créativité aux agriculteurs dans leur itinéraire technique.

Développement du couvert de trèfle dans la modalité TCS chez Bertrand Paumier

Une réussite sur le plan agronomique et écologique

Sur le plan agronomique, le projet est un vrai succès : les corridors solaires fonctionnent, avec une baisse de rendement de 10 à 20% maximum. On peut émettre l’hypothèse que le manque à gagner en termes de rendements se retrouve dans une économie d’intrants puisque les sols retrouvent leur auto-fertilité plus rapidement.

Levée du trèfle dans les corridors solaires

Les feuilles du côté du corridor sont plus grandes ; elles se développent majoritairement sur la zone où elles captent le plus de lumière sans pour autant produire plus de chloroplastes. Cela prouve que lorsque le maïs a plus de lumière grâce au corridor, il tolère une double densité sur la ligne. Lorsque le couvert est implanté dans une fenêtre météorologique adaptée, que le choix d’espèces combine leurs bienfaits, et que le couvert est géré à floraison, on limite la compétition du couvert avec le maïs, et on favorise la dégradation du couvert.

Des défis au niveau du machinisme

Sur le plan technique et économique, le déploiement des corridors à plus grande échelle pose la question du machinisme et de la main d’œuvre, principalement pour la gestion des couverts.

Corridors solaires vus du ciel chez Nicolas Gorin

Sur le plan pédagogique, le projet a été très riche d’apprentissages pour tous les acteurs du projet. Le stage “flottant” de Solène, qui travaillait auprès de 3 agriculteurs, a permis de rapidement créer la confiance nécessaire pour comprendre les besoins des agriculteurs par rapport à cette technique, et de faire circuler les apprentissages rapidement entre les fermes. L’animation d’échanges entre agriculteurs a été clé pour trouver des solutions ensemble aux problématiques techniques rencontrées, et avoir le courage de réaliser une opération technique en ayant le soutien moral et la validation technique du groupe.

Participez au déploiement à grande échelle !

Le déploiement à plus grande échelle de l’expérimentation, pourquoi pas avec un essai réalisé dans 10 à 20 fermes, est envisageable en se basant sur les leçons tirées de cette première expérience :
→ accorder une attention particulière au semis des couverts et aux variétés choisies
resserrer les possibilités d’itinéraire technique pour permettre une comparaison plus précise
utiliser des variétés supportant la sur-densification sur le rang afin d’optimiser l’apport de lumière au maïs
→ mesurer les performances agroécologiques d’une parcelle recevant des corridors solaires sur le long terme, notamment pour valider la séquestration importante de carbone permise par la technique.

Les expérimentateurs de corridors solaires, au moment de l'enterrage des slips en juin 2020

Ce projet plaide en faveur de projets agroécologiques “holistiques” qui ne se consacrent pas uniquement aux performances agronomiques mais aussi aux apprentissages humains. Valoriser et développer le savoir-être des agriculteurs et agricultrices est un élément clé de la transition agroécologique.

De nombreuses fermes en France ont indiqué vouloir réaliser l’essai au printemps 2021. Le projet recherche un organisme technique, un groupement d’agriculteurs, une structure pouvant prendre en main le suivi et la valorisation de l’expérimentation à l’échelle régionale ou nationale.

Estimation du rendement par l'observation des épis chez Valery Groleau, en Vendée

Si vous souhaitez mettre en place l’essai dans votre ferme, vous pouvez remplir ce formulaire.

Si vous êtes intéressé.e, vous pouvez me contacter : opaline.lesagronhommes chez gmail.com