Opaline LYSIAK

  • L'architecture de la technique des corridors solaires (source : H.L. Britt)
  • Le pâturage tournant dynamique de Félix Noblia
  • Estimation du rendement par l'observation des épis chez Valery Groleau, en Vendée
  • Implantation de couverts avant plantation d'un rang de pommiers
16
avril
2020

Du maïs en corridors solaires

Comment bâtir la fertilité des sols quand on cultive du maïs en utilisant la technique des corridors solaires ou du maïs à 150 cm ?
Comment partager nos essais et apprendre ensemble en impliquant des étudiants dans le partage des connaissances ?
C’est l’objet de cet article !

Le maïs est la 2ème plante la plus cultivée en France et la 1ère plante cultivée au monde. C’est un défi d’implanter un couvert végétal après la récolte du maïs, car il fait souvent trop froid et la luminosité diminue.
En écrivant cet article, j’aimerai vous donner envie de tester la technique du maïs à 154 cm et surtout, valoriser et partager vos résultats en les faisant remonter à la communauté des étudiants de l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse.

Pourquoi semer du maïs en utilisant la technique des couloirs (ou corridors) solaires ?

Implanter un couvert pendant la culture du maïs permet de sécuriser le développement du couvert, couvrir et structurer les sols, apporter de la biodiversité pendant la culture et de la biomasse pour les sols.

En Amérique du Nord, la technique des "Solar Corridors" (ou 60 pouces, ou 1m50, ou corridors solaires, ou couloirs solaires) est expérimentée depuis 2005 et a fait ses preuves. Cela peut surprendre, mais écarter les rangs à 150 ou 154 cm selon vos semoirs entraîne pas ou peu de baisse de rendement, si l’on respecte quelques bases de l’itinéraire technique. Et puis si vous avez tendance à penser long terme, une baisse de rendement la première année ne devrait pas vous effrayer.

En 2018, 5 agriculteurs de l’Iowa (Etats-Unis) réalisent que l’écartement des rangs et le semis de couverts à la fin du printemps permet d’assurer le développement d’un couvert abondant et diversifié, par rapport à une technique de maïs à 37,5 cm qui engendre des problèmes de fertilité à long terme. Ils obtiennent des rendement similaires entre l’écartement classique (30 pouces - 77 cm) et l’écartement double (60 pouces - 154 cm).

Les essais se poursuivent en 2019 aux Etats-Unis et au Canada. Au Québec, en 2019, un groupe de 11 agriculteurs (7 en bio, 4 en AC) parmi lesquels Sébastien Angers (qui lance le groupe) et Jocelyn Michon, mettent en place des essais dans leurs parcelles.

Aux Etats-Unis et au Canada, 15 années d’expérience montrent que :
⇒ Semer un couvert sur 50% de la surface de la surface pendant la croissance du maïs permet de bâtir la fertilité des sols pendant la culture du maïs
⇒ Cette technique permet de réduire les coûts de fertilisation et de travail du sol - certains l’utilisent en période de transition vers l’agriculture du conservation ou agriculture régénérative.
⇒ Ainsi, si la baisse de rendement "terrain" moyenne la première année est de 20%, le rendement économique devient très intéressant après 3 à 5 ans.
⇒ Le couvert végétal étouffe les adventices pendant la culture du maïs et après la culture du maïs, facilitant la gestion de l’enherbement sur l’ensemble d’une rotation. C’est donc aussi un bon levier pour passer en bio !
⇒ Le carbone labile est essentiel dans la dynamique de l’azote. La biomasse de couverts produite joue un rôle essentiel. Certaines plantes créent de l’enracinement profond, pour injecter du carbone à différentes profondeurs. Le maïs à 154 cm permettrait de diversifier les types d’enracinement dans un même espace-temps sur la parcelle.

L'intelligence collective du groupe d'agriculteurs québécois sur le maïs à 60 pouces

« Un prémisse de la technique des corridors solaires est que l’architecture de la plantation donne au maïs l’accès à des radiations photosynthétiquement actives, ce qui augmente la production de composés carbonés avec au final une augmentation de biomasse et de grains récoltés »
(Kremer and Deichman, 2014)

Dans cette interview que j’ai réalisée à distance, Sébastien Angers explique pourquoi mettre en place la technique :

Vous pouvez aussi écouter Sébastien en podcast audio dans votre tracteur !
Cette technique est donc très intéressante pour tous ceux qui souhaitent :
⇒ Bâtir la fertilité des sols
⇒ Implanter des couverts plus facilement après maïs
⇒ Eventuellement faire pâturer les couverts
⇒ Limiter les traitements herbicides ou le désherbage mécanique
⇒ Plus facilement allier AB et AC !

En France, après la visite de Sébastien Angers en mars 2019, Bertrand Paumier choisit de mettre en place un premier essai. La sécheresse combinée à une technique d’implantation des couverts (à la volée) non adaptée n’a pas permis un développement fructueux des couverts.

Comment faire : un ITK créatif mais respecter certaines règles !

La technique des couloirs solaires débarque en France : l’objectif est de ne pas se limiter en termes de créativité des agriculteurs, et, pour reprendre Frédéric Thomas, de faire un "screening" et ratisser large dans les idées des paysans. Par contre, il faut aussi limiter la casse en tenant compte des retours d’expériences du Québec notamment.

Dans cette vidéo, Sébastien présente les bases de l’itinéraire technique. Beaucoup de choses sont applicables directement en France, mais à adapter évidemment dans votre contexte régional et selon les objectifs de votre ferme !

Vous pouvez aussi écouter Sébastien en podcast audio dans votre tracteur !

La technique de semis la plus utilisée est la suivante : sur un semoir 8 rangs, on ferme un rang, on ouvre 2 rangs, on ferme un rang, on ouvre 2 rangs. Au final, les couloirs ouverts à 150 cm sont séparés par 2 lignes de maïs à 75 cm. Cela permet d’obtenir une densité de semis de 134 000 sur le rang mais une population à l’hectare toujours égale à 90 000 pieds/ha. On évite ainsi de trop densifier sur le rang.

Ici, Jocelyn Michon a créé des couloirs solaires de couverts végétaux tous les 1m50

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Préférez une orientation des rangs qui permette au soleil de pénétrer dans le rang sur une longue période de la journée, pour maximiser la photosynthèse du couvert et des feuilles les plus basses du maïs

Optez pour des variétés de maïs qui répondent bien à une augmentation du potentiel de photosynthèse, qui peuvent faire 2 épis par pied, plutôt pour des dentés qui vont réguler le nombre de grain par épis en fonction de la ressource en azote, en lumière et en eau.

Adapter la dose de semis en fonction du potentiel de fertilité de la parcelle : plus le potentiel de fertilité azoté est élevé plus vous pouvez vous permettre de densifier

L'architecture de la technique des corridors solaires (source : H.L. Britt)

Préparation du sol : trouvez une manière de désherber, chimiquement ou mécaniquement, avant le semis du maïs et des couverts, car le désherbage

Largeur de couverts : il est vivement conseillé de semer le couvert dans les couloirs solaires sur une bande de 60 à 70 cm pour limiter la compétition avec le maïs et pouvoir gérer le couvert (fauche par exemple)

Le matériel utilisé pour le semis des couverts dépend de vos moyens et de votre créativité ! Au Québec, Pierre Olivier Gaucher utilise un semoir SD à céréales dont les rangs qui passent au dessus du maïs sont fermés.

Ne pas semer trop tard le maïs et les couverts, pour leur permettre un développement optimal. Certains sèment tout en même temps, d’autres sèment le couvert au stade 3 à 6 feuilles du maïs.

Gestion des couverts : : un équilibre est à trouver entre la « diversification » du mélange de couverts et la quantité de passages et de travail demandée pour gérer les couverts. On a deux extrêmes au Québec entre Jocelyn Michon - un passage pour le semis de maïs et cow pea, zéro opérations jusqu’à la récolte du maïs - et Sébastien Angers - 3 semis de 3 mélanges de couverts différents et gestion du couvert par la fauche.
La floraison est essentielle pour permettre au couvert de créer tout son potentiel.

Sébastien Angers a fauché son couvert multi-espèces puis a réalisé que cela donnait peut-être un "coup de fouet" au couvert qui puise des ressources dans le sol au détriment du maïs. Pourtant la fauche était nécessaire pour éviter la montée en graines du couvert. A creuser !
Jocelyn Michon, lui, préfère semer un couvert mono-espèces de cow-pea.

Jocelyn Michon explique dans cette interview que j’ai réalisée à distance, pourquoi il s’est lancée dans la technique et détaille son ITK.

Vous pouvez aussi écouter Jocelyn en podcast audio dans votre tracteur !

Choix des couverts : soyez créatifs !

Sébastien Angers propose de raisonner en terme de nombre « d’espèces par espace-temps » :
- Maïs seul = 1 espèce par espace-temps
- Maïs + cow pea = 2 espèces par espace-temps
- Maïs + mélange de 7 espèces = 8 espèces par espace-temps

Pierre-Olivier Gaucher conseille, dans un article du TCS n°107 : « Les intercalaires en écartement classique subissent rapidement l’effet ombre du maïs et les espèces ont toujours été limitées à celles préférant une faible luminosité (Ray-grass, lin et trèfle incarnat). Dans le cas du 154 cm, c’est tout l’inverse. Beaucoup plus d’espèces sont possibles, la saison végétative est plus longue, le potentiel fixateur d’azote du mélange et son rapport C/N (stabilité et qualité carbonée), ainsi que l’arrière effet attendu l’année suivante ont été pris en considération. C’est donc au final, un mélange 7 espèces qui fût choisi pour assurer la bonne conjugaison entre les critères désirés. (pois fourrager, féverole, sarrasin, radis, ray-grass, mélilot et lin) »

Sébastien Angers (en bio) a semé son maïs dans une bande travaillée, sur un couvert multi espèces

Certains ont semé le maïs en même temps que les couverts. D’autres ont semé les couverts au stade 3 feuilles du maïs. D’autres ont semé les maïs dans des couverts encore vivants.
« Au Québec, pour ceux qui ont déjà vu et vécu notre saison de croissance, le maïs pousse vite voir très vite. Le moment d’implantation de l’intercalaire est donc crucial. Le stade privilégié par notre consortium a toujours été entre 4 et 6 feuilles. Dépassé ces stades, le maïs s’emballe et sa croissance limite le développement de la végétation de l’inter rang et annule le potentiel agronomique et économique du couvert »

Jocelyn Michon a opté pour le cow pea dans l'entre-rangs

Exemples de plantes semées au Québec :
Vivaces : luzerne, lotier, trèfle rouge, chicorée, ray-grass, fléole,
Bi-annuelles : mélilot, vesce velue, seigle
Annuelles : pois fourrager, trèfle d’Alexandrie, sarrasin, phacélie, haricot noirs, teff, tournesol (non hybride), chia, etc...

Quel protocole pour pouvoir mesurer vos résultats...

Voilà, vous avez beaucoup d’infos pour démarrer votre essai. Et si vous souhaitez pouvoir le partager, le comparer, voilà ce que vous pouvez faire :

⇒ Le mettre en place juste à côté d’un témoin à écartement normal, dans une parcelle accessible pour faciliter les visites des curieux. Vous verrez c’est très agréable de se promener dans un couloir de soleil plein de papillons et d’abeilles.

⇒ Semer 2 à 3 passages de semoir au moins (tout dépend de votre relation au risque et si vous êtes joueur)

Mettre en place un suivi et des mesures simples : comptage de couverts, biomasses des couverts, test bêche, test du slip, et bien sûr, rendement. Si vous répétez l’essai pendant plusieurs années vous verrez que la matière organique augmente sûrement plus vite sur l’essai en corridors solaires. Vous pouvez utiliser l’outil les Indiciades pour mesurer l’évolution de la matière organique avec le bilan humique.

... et partager cet essai à une plus grande communauté ?

" Les agriculteurs sont les mieux à même de connaître le mélange adapté à leur parcelle pour la production de maïs. En revanche chaque agriculteur devra faire remonter au reste de l’équipe son choix de mélange pour tirer les meilleures conclusions de la force du groupe car le détail du mélange le plus adapté à ce type de culture est une deuxième étape assumée du projet qui vise l’optimisation de cette technique. La mesure de la production du couvert et les données biologiques et physico-chimiques du sol sont des données suffisantes à ce stade de la recherche pour la comparaison inter-sites et l’explication des différences observées" explique Sébastien, évoquant le mode de fonctionnement au Québec.

Et bien sûr si vous faites des mesures, vous savez que plus les agriculteurs à mettre en place cet essai seront nombreux, plus on apprendra rapidement et on fera évoluer la technique.

" Expérimenter au même moment permet d’avoir une expérimentation collective et plus la créativité des agriculteurs est développée plus l’intelligence collective est forte"

La créativité des agriculteurs est sans limites : ici du maïs façon technique des trois soeurs !

Si vous souhaitez vous lancer dans une aventure agroécologique humaine, voilà ce que je vous propose :

⇒ Recevoir le "kit" et vous connecter avec tous les agriculteurs qui vont mettre en place l’essai cet année, en vous manifestant à travers ce formulaire et en indiquant que vous souhaitez entrer dans le réseau de l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse pour l’essai maïs à 154 cm.

⇒ Dans ce kit, je vous donne des éléments pour savoir comment nous faire remonter votre ITK et vos résultats. Ce sont les étudiants de l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse, qui ont envie d’apprendre avec vous et de vous aider à partager vos innovations, qui feront ce travail.

⇒ Les étudiants échangeront avec vous à distance et viendront dans vos fermes pour faire des mesures, réaliser des vidéos, valoriser votre travail, et centraliser les données pour catalyser l’apprentissage sur cette technique.

⇒ En échange, nous vous demanderons d’adhérer à l’association Les Agron’Hommes ; le prix est libre, mais nous conseillons une adhésion à 100€ pour les fermes et 50€ pour les étudiants (66% déductible des impôts bien entendu). Ainsi, si 10 agriculteurs adhérent, il y aura 1000 euros pour financer le travail des étudiants : consolidation des résultats et de valorisation !

Nicolas Gorin, Pierre-Henri Hamon et Bertrand Paumier mettent en place l’essai en 2020.

" Pour travailler en équipe il faut séparer les idées des personnes. C’est dans le partage collectif de nos histoires qu’on trouvera
comment faire de l’agroécologie ensemble » Sébastien Angers

Dans cette vidéo, Sébastien Angers et Jean-François MESSIER expliquent quelles bases ils ont développées pour un partage de connaissance, un apprentissage bienveillant et performant au sein de la cellule d’innovation sur le maïs en couloirs solaires. Ils ont créé une page Facebookdédiée au partage des informations.

Vous pouvez aussi écouter Sébastien et Jean-François en podcast audio toujours dans votre tracteur (... ou en faisant la vaisselle) !

Une Ecole d’Agroécologie Voyageuse ?

Chaque agriculteur est engagé dans un chemin de la transition agroécologique, à sa manière. Le projet Les Agron’Hommes lance l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse en septembre. Un programme d’un an pour que les étudiants puissent aider les agriculteurs dans leurs projets en faisant voyager les connaissances de ferme en ferme, tout en apprenant sur le terrain. L’objectif est d’inspirer et former des paysans facilitateurs de transition agroécologique !

Sébastien Angers avec les étudiants du lycée agricole de Chambray en Normandie

Parmi les thèmes que les étudiants pourront choisir pour leur parcours : la réintégration de l’élevage dans les fermes céréalières, les macérations de plantes en grandes cultures, l’Agroforesterie successionnelle ou encore le maïs en corridors solaires. Si vous avez des idées de thèmes et souhaitez participer au projet, remplissez ce formulaire !

Merci à tous et n’oubliez pas : la créativité des agriculteurs est l’un des piliers pour construire des paysages vivants !


9
mars
2020

Pour régénérer, il faut de la pérennité dans nos systèmes

Mettre en place des plantes pérennes demande de régénérer aussi notre vision de l’agriculture, de la société et de la façon dont nous mangeons.

J’aime beaucoup ce lapsus de l’agriculture de "CONVERSATION". Et quand les discussions avec mes amis continuent sur l’AC, on se dit souvent que cette agriculture aura émergé justement grâce à des conversations profondes qui n’avaient pas lieu avant. Je crois à l’AC, j’ai tout appris sur les sols vivants grâce à ceux qui m’ont emmené dans leurs parcelles pour observer le sol à l’aide d’une bêche. C’est pour cela qu’aujourd’hui je crois que le mot CONSERVATION a fait son temps. Certains ACistes sont véritablement conservateurs dans leurs pratiques et leur mentalité. D’autres ACistes au contraire, souhaitent évoluer en permanence, sortent de leur zone de confort pour expérimenter, prennent des risques, et ont souvent des résultats qui régénèrent les sols plutôt que de les conserver. Ces ACistes là aiment partager et évoluer dans leur système de prise de décision. Ils ont une vision holistique. Alors oui bien sûr, la BASE c’est de CONSERVER nos sols, puisque le SOL c’est la BASE. Préserver ce capital sans lequel les sociétés humaines disparaîtraient. Mais beaucoup d’entre vous régénèrent déjà leurs sols. Mettent en place les conditions pour retrouver une auto-fertilité et peu à peu se passer de la chimie.

Sortir de sa zone de confort pour évoluer

Certains d’entre vous ont fait le choix de réintégrer des plantes pérennes dans leur système, pour réduire encore plus le nombre de passages et maintenir le sol intact, avec ses racines et toute sa vie, sans aucune perturbation. Faire appel à l’élevage pour valoriser ces plantes pérennes est une superbe initiative, qui permet aussi de recréer des écosystèmes humains et de belles collaborations. Je pense à Franck Baechler, qui se dit "éleveur de sols et d’animaux". Elever un animal, c’est littéralement l’amener vers le haut, lui donner les conditions de vie idéales pour qu’il développe toutes ses capacités. C’est pareil pour un sol.

Couvert Biomax chez Bertrand Paumier, pionnier de l'AC en Bretagne

Mais alors pourquoi cet article ?

C’est le livre de Mark Shepard "Agriculture de Régénération" (en anglais "Restoration agriculture") qui a déclenché l’envie de saisir le clavier. Mark Shepard a transformé, en 20 ans, 42 hectares de terres labourées en un oasis de productivité et de biodiversité.

Agriculture de Régénération, Mark Shepard

Voilà ce que Mark écrit : « Nous partageons tous la meme crise dont les racines plongent dans les méthodes de production de notre nourriture. Ce que l’on mange est indirectement responsable de toutes les crises auxquelles l’humanité est confrontée aujourd’hui »

Mark Shepard part du fait que toutes les civilisations ont disparu parce qu’elles ont échoué à faire évoluer leurs systèmes agricoles. Et toutes ces civilisations - Mésopotamie, Egypte, Perse, Inde, Chine, Grèce, Rome, Amérique centrale et du Sud - dépendaient de cultures annuelles pour leur alimentation. La plupart des habitants de notre planète dépendent d’une « agriculture annuelle ». Le riz dans nos bols, le blé dans nos pains, les céréales du petit déjeuner, les pâtes, le maïs, le soja qui permet de nourrir une grande partie des animaux pour la production de viande et de laitages. De par leur nature, les annuelles ont besoin de pousser sur des sols dénudés. " C’est dans l’ordre naturel des choses, elles sont partis les premières à coloniser un site après une perturbation des sols. Etant donné qu’elle sont à la base de notre alimentation, on peut dire que « ça a toujours été comme ça » mais en fait, dans l’histoire de l’humanité, les humains dépendent d’elles depuis environ 10 000 ans. Les cultures annuelles peuvent être récoltées si rapidement qu’une grande partie de la population fut « libérée » de la corvée de recherche de nourriture. Les céréales, pouvant être stockées et livrées à un endroit donné, ont favorisé le développement de peuplements. Les villes résultent directement de la culture de plantes annuelles"

Agroforesterie chez Pierre Pujos, Gers

Pour une grande majorité des cultivateurs, qui dit plante annuelle dit labeur intense pour les humaines, leurs machines et tout le système économique qui les maintient en activité. D’où la malédiction biblique « C’est à la sueur de ton front que tu mangeras du pain, jusqu’à ce que tu retournes à la terre, d’où tu as été pris ; car tu es poussière et tu retourneras à la poussière » (Genèse 3:19).

Citation tirée de "Agriculture de Régénération" Mark Shepard

Les ACistes vivent un peu moins cette malédiction puisqu’ils transforment la poussière en sol fertile, mais le système économique n’a pas évolué pour remercier leur travail. La dépendance à la chimie des systèmes en AC avec semis direct pur montre bien que les plantes annuelles ont en effet, besoin de sols nus, ou en tout cas avec une compétition éliminée - pour bien pousser puisque ce sont des plantes pionnières par nature. J’en suis convaincue : il n’y aura pas d’ABC sans intégration de l’arbre dans les agrosystèmes (« tout sol tend vers la forêt » Ernst Zürcher) et sans élevage (n’en déplaise aux vegans qui eux, dépendent fortement des cultures annuelles aujourd’hui) Alors comment intégrer les plantes pérennes dans vos systèmes ? Puisque ces plantes sont « pérennes » - qu’elles soient plantes de prairie, arbres ou arbustes - elles n’impliquent qu’une perturbation du sol, à l’implantation. Alors comment pourraient-elles vont donner du fil à retordre si vous organisez bien le travail dans votre écosystème ?

La Ferme Écosystème (Opaline Lysiak)

Créer des fermes écosystème, la nouvelle frontière des agriculteurs

En une génération, la France a perdu 1 million de fermes. Il nous reste moins de 440 000 fermes en France et dans les 10 prochaines années, la moitié des agriculteurs part en retraite. Alors oui, de plus en plus de jeunes sont attirés par le « retour à la terre » mais quel modèle de ferme peut-on imaginer avec eux ? Comment transmettre une ferme de 50 ha gérée par une seule personne avec un modèle tout de même « monoculturel », à des jeunes qui n’ont pas envie de travailler seul, 60 heures par semaine avec un salaire rikiki ? Le modèle de Mark Shepard est viable, il demande simplement qu’on s’y mette : création d’un modèle de ferme écosystème pour installer des jeunes en agroécologie, formation d’une armée de paysans sur petites et grandes surfaces qui arrivent à travailler ensemble et entre générations, comme le fait Les Agron’Hommes (je fais ma pub) ou Fermes d’Avenir. Attention, je vais utiliser un gros mot : Mark Shepard fait de la permaculture sur 42 ha.

Les ACistes ont l’ADN pour créer des fermes écosystèmes

Depuis que vous prenez soin des sols, n’avez vous pas une furieuse envie de partager votre expérience au fur et à mesure de votre évolution ? Ne rencontrez vous pas des jeunes qui aimeraient s’installer ? Vous vous demandez comment créer de la valeur et de l’emploi sur une ferme céréalière ? Une fois que l’étape de la remise en route des sols a été franchie (et je vous admire sincèrement pour cela !) comment créer de la valeur ajoutée pour que l’économie de la ferme et du territoire soit reboostée ? Comment créer une ferme écosystème avec chacun son petit business (façon Joël Salatin - Polyface Farm) ou avec la vision de Frédéric Thomas ? Comment créer un paysage abondant de nourriture, de biodiversité et de vers de terre, qui donne envie à une flopée de citoyens de soutenir votre travail ? Si vous avez une centaine d’hectares, c’est un sacré terrain de jeux et je serai curieuse de récolter vos idées pour installer des jeunes à l’avenir.

Bertrand Paumier me présente son essai d'orge précoce

L’autre jour sur la page Facebook Les Agron’Hommes, un internaute a critiqué le fait qu’une plantation d’arbres soit faite par 15 bénévoles, et que "s’il avait fallu payer tous ces gens, ça aurait couté cher". Le fait est qu’aujourd’hui, on ne peut pas payer ces gens et que le monde est plein de jeunes et moins jeunes qui ont envie de décoller leurs fesses de leur chaise et aller aider les agriculteurs à créer des paysages nourriciers.

Faites vous partie de ceux qui critiquent les fermes qui ont un modèle économique en partie basé sur la formation ?
Ou peut-être critiquez vous les néo-ruraux qui ont gagné de l’argent pendant une partie de leur vie et qui utilisent cet argent pour démarrer une ferme agroécologique ?
Puisque la France ne compte quasiment plus de paysans, où trouver les gens et l’argent puisqu’il n’est plus dans le monde agricole ? Avez-vous oublié qu’une ferme céréalière dépend en grande partie d’aides de la PAC, alors que beaucoup de fermes en permaculture n’y ont pas droit ? Vous avez des connaissances précieuses à partager. Je vous encourage sincèrement a développer le partage de votre expérience par la pédagogie, et à y gagner de l’argent - en restant transparent sur vos chiffres - que vous réinvestirez dans votre transition agroécologique et votre bien-être. Personnellement, quand je me regarde dans la glace tous les matins, je n’ai aucun problème de conscience à me dire que des entreprises privées financeront en partie les 5000 arbres que je vais planter sur ma ferme.

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Pour découvrir et soutenir le projet d’Ecole d’Agroécologie Voyageuse des Agron’Hommes : https://lesagronhommes.com

Pour participer à l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse en tant que ferme : https://lesagronhommes.typeform.com/to/P1Zd5s


13
novembre
2019

Le plein d’agroécologie en Bretagne

Un petit groupe d’irréductibles bretons férus d’agriculture de conservation - j’ai nommé, l’association BASE Bretagne - met en place des expérimentations vraiment sympa : semis de maïs en direct dans la féverole, sarrasin en couvert d’été, semis direct de prairie ou encore essais de maïs semé à 154 cm d’écartement.


La Région Bretagne dans le cadre du projet Agriculture Ecologiquement Performante (AEP), les soutient pour qu’ils valorisent ces essais.

Nos paysans sont à différents niveaux de la transition agroécologique et de différentes générations, ils ont donc des histoires et perceptions des pratiques « agroécologiques » très diverses et riches.

Le problème, c’est qu’ils n’ont ni le temps ni les compétences pour :
- suivre leurs essais sur le long terme
- mieux comprendre quelles sont les clés de décision qu’ils utilisent au quotidien au sein du groupe
- communiquer à l’extérieur du groupe, vers la communauté agricole et la société en général.
- aller chercher dans les écoles des étudiants qui pourraient les aider à mener ces missions

Mon rêve : une armée d’étudiants pour aider les agriculteurs

En face, dans les écoles d’ingénieur et les lycées agricoles, beaucoup de jeunes se demandent comment apprendre l’agroécologie par l’expérience. Ils souhaitent des expériences pratiques, impliqués dans des projets. Et plus que tout, ils souhaitent être utiles. C’est l’essence du projet les Agron’Hommes.

Alors j’ai commencé à capitaliser leurs essais dans l’application Landfiles et sur la chaîne Youtube Les Agron’Hommes.

Les essais des 8 agriculteurs sont tous dans Landfiles. Voici ce que permet l’application :

✿ Plutôt qu’un suivi d’essai réalisé sur une année par un technicien, dans ce cas l’utilisateur peut publier des photos légendées avec les données de l’essai. Les informations sont capitalisées par ferme, par parcelle, et peuvent ensuite être publiées au sein de groupes d’agriculteurs. Les utilisateurs peuvent être : l’agriculteur qui réalise l’essai, le technicien ou conseiller et les étudiants qui réalisent leur stage dans la ferme. Toutes les personnes invitées sur la ferme et ayant besoin de ces données pour prendre une décision ou pour mieux comprendre les pratiques agroécologiques peuvent y accéder.

✿ Le groupe peut créer un formulaire de collecte de données selon ses besoins et ensuite extraire les données pour en faire des graphiques, ou comparer les données à d’autres groupes d’agriculteurs présents sur Landfiles, dans d’autres régions par exemple.

✿ Avec cette méthode, la prise de décision est facilitée car l’utilisateur a d’une part accès à tout l’historique de la parcelle et d’autre part peut se mettre en réseau avec des agriculteurs se posant le même type de questions via un moteur de recherche. 


C’est en fait un WhatsApp agricole où tout est organisé par ferme, par parcelle, et où les groupes peuvent être jumelés entre eux !

Voilà ce que ça donne sur l’application :

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Si vous les souhaitez vous pouvez télécharger l’application, gratuite pour les agriculteurs, créer votre ferme et commencer à publier.

Les vidéos qui suivent, que j’ai réalisées, ont également été intégrées dans Landfiles. La vidéo permet un autre regard sur l’essai et une plongée dans l’univers de l’agriculteurs.

✿ Seigle sous couvert de sarrasin chez Patrice Le Callonec :

✿ Maïs semé à 150 cm d’écartement chez Bertrand Paumier :

✿ Blé semé en août chez Pierre Henri Hamon :

✿ Couvert d’été multi-espèces pâturé avant méteil chez Dominique Luherne

✿ Olivier Launay donne un retour d’expérience de l’AC :

WANTED : étudiant ingénieur passionné d’agroécologie !

Le projet les Agron’Hommes a pour mission d’incuber les talents de demain. Nous cherchons pour un stage ou une césure démarrant en février 2020 un étudiant d’école d’ingénieur passionné d’agroécologie, souhaitant apprendre au contact des agriculteurs, aimant à la fois le terrain, la communication visuelle et l’ingénierie de projet.

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Voici les différentes missions proposées à cet étudiant :

Mission « glomaline » : souder le groupe

✿ Les agriculteurs sont accompagnés par l’étudiant sur le suivi des essais et le partage au sein du groupe. Il consolide les échanges entre les agriculteurs, en orientant les thématiques d’échanges.
✿ L’étudiant apprend parl’expérience au contact des professionnels.
✿ L’étudiant sera un « pont » entre les agriculteurs et les étudiants plus jeunes, des lycées agricoles, qui doivent être en contact avec les agriculteurs et qui manquent de situations pédagogiques innovantes.

Mission « Holistique » : accompagner à la prise de décision
✿Dans une perspective de transition agroécologique, les clés de décision sont bien plus utiles qu’une recette type. Le rôle de l’étudiant sera de repérer et classer ces clés de décision chez les agriculteurs innovants.
✿ Pour être accompagné et inspirer les agriculteurs, le stagiaire pourra faire appel à des intervenants sur la thématique de la prise de décision.

Mission « Mycorhize » : communiquer
✿ Réalisation (ou délégation à des étudiants de lycées agricoles) de photos de qualité / proposer des lieux (réels ou virtuels) où valoriser ces photos.
✿ Réalisation de vidéos (ou délégation à des étudiants de lycées agricoles) et valorisation de ces vidéos sur des réseaux agricoles et grand public.
✿ Le stagiaire ingénieur réalisera des articles pour la presse locale et en ligne relayé ensuite sur les réseaux sociaux.

Mission "Collembole" : animer des ateliers
✿ Les étudiants pourront animer, lors d’évènements comme les 20 ans de BASE en mai 2020, des ateliers intergénérationnels pour discuter, autour des essais sur Landfiles, de protocoles participatifs de prise de décision dans une situation agronomique donnée.

Mission "Ver de Terre" : déploiement du prototype
✿ Le projet réalisé avec BASE Bretagne et 8 agriculteurs peut être déployé dans d’autres territoires. D’une part pour multiplier certains essais et valider leur viabilité entre contextes, et d’autre part pour multiplier les projets d’incubateurs.

Si vous êtes intéressé, envoyez un mail avec votre lettre de motivation à opalinelysiak chez gmail.com


26
septembre
2019

Une belle association maïs + Lab Lab

Quand on écrit un article dans TCS, c’est intéressant de pouvoir faire un suivi du sujet sur le terrain, en vidéo.

Après l’article du TCS 103 sur les associations maïs + légumineuses visant l’autonomie fourragère, j’ai eu la chance de pouvoir passer une matinée sur le terrain avec Jeremy Bonte, de chez Semental, entreprise semencière spécialisée dans les fourrages et proposant la légumineuse Lab lab de variété Rongaï en association avec le maïs pour viser l’autonomie fourragère des élevages laitiers.

Ici, nous sommes chez Philippe Alix, dans le Nord de l’Ille-et-Vilaine. Philippe est en TCS depuis 10 ans et teste pour la première fois cette année un mélange composé de 80 000 graines à l’hectare pour le maïs et 80 000 graines pour le Lab Lab.

Proche du sol, la feuille du Lab Lab est plus large

"La réussite repose souvent sur la densité et la date de semis, et sur la fertilisation" Jeremy Bonte, Semental

L’une des clés de la réussite est la date de semis - le lab lab doit être semé dans un sol réchauffé qui ne subira plus d’écarts de température trop importants - et la fertilisation puisque pour le moment il n’existe pas d’inoculum pour le lab lab et que la plante ne produit pas d’azote. Elle va consommer 40 à 50 unités d’azote de plus qu’un maïs seul.
Au final, le résultat compensera sûrement l’investissement dans la semence et la fertilisation (ici, fumier et lisier). Ensilage prévu le 3 octobre. On attend les résultats de valeurs alimentaires !


23
août
2019

Maraîchage : produire la fertilité sur place

Peu de bâches plastiques à l’horizon... c’est bien pour les photos. Comme beaucoup de maraîchers, Maxime Barbier a utilisé et utilise encore (en 2019) la paille pour couvrir le sol. Mais face à une baisse de fertilité (la prairie sur laquelle il a démarré la production n’a plus d’arrière effet) et avec le désir de produire sur place la matière organique, il se lance dans une incroyable aventure : celle des couverts relais !

Maxime dans sa planche de courges + vesce velue fauchée

De retour de Sologne, je m’arrête (ça devient une routine) chez Maxime Barbier dans la Sarthe.

Objectif : faire une nouvelle vidéo, après celle, tournée en 2018, qui a fait près de 50 000 vues sur la chaîne Les Agron’Hommes en un an.

En fait, les maraîchers sont à la recherche d’itinéraires techniques pour couvrir le sol, le régénérer, produire de beaux légumes, et limiter le temps de travail.
Installé depuis 2017 sur 4000 m2 puis 7000 m2 aujourd’hui (une partie des légumes est produite dans la ferme de sa maman, où il a accès aux outils),

Maxime m’épate toujours par sa capacité à expérimenter et prendre des risques, tout en assurant une magnifique récolte, qui rend fertile les sols, les cuisines, et l’économie de la ferme.
Journaliste ultra-curieux, Maxime va chercher des itinéraires techniques de "grosses fermes" pour les adapter à des planches de 25 m2. Il s’inspire beaucoup des agriculteurs ACistes des Etats-Unis, où il a fait plusieurs voyages-reportages.

Un beau jour de septembre 2018, alors que je cherche à me poser quelque part entre la Bretagne et la Sologne, Frédéric Thomas me propose de m’arrêter chez Maxime.

J’y reste 4 jours pour lui donner un coup de main, et on finit par faire cette vidéo :

Prendre des risques sur 5% des surfaces

Salades dans luzerne fauchée
Salades dans luzerne fauchée

Les saisons s’enchaînent, et Maxime apprend des ses essais/erreurs/succès. Il n’arrête pas l’expérimentation. En fait, chaque planche de légumes est une expérimentation en tant que tel, mais avec un degré de risque plus ou moins grand.

« Je dirais que j’ai 5% de pratiques à haut risque. C’est surtout les essais sous couvert permanent, comme avec la luzerne, où il peut y avoir beaucoup de compétition ». Sur 150 planches, il estime qu’il y a eu, du fait des expérimentations, une baisse de production sur environ 10 planches, et 3 planches "ratées".

"Roulage" du couvert de vesce velue avec une palette

Ces expérimentations lui permettent de toujours progresser, pour produire des légumes sains, avec des charges en intrants limitées, en construisant l’auto-fertilité des sols. J’envie beaucoup Camille, son apprenti maraîcher, qui vit ces expérimentations au quotidien.

  • Féverole, radis, lupin, trèfle ont été semés en même temps (...)
  • Le couvert s'est développé après le ramassage des (...)
  • Maxime et sa fille, au milieu d'un couvert seigle + (...)

Le pouvoir de la vidéo : MSV et les autres

Dans le TCS n°100, Maxime Barbier faisait le point avec son article "Les carottes ne sont pas cuites" sur les expériences du réseau MSV - Maraîchage sur Sol Vivant, très dynamique sur Youtube. La preuve, en appelant ma vidéo "Maraîchage sur Sol Vivant", j’ai probablement attisé l’intérêt de tous ceux qui veulent produire des légumes sans créer des cimetières de vers de terre.

Face au succès énorme de cette vidéo, je décide de renouveler l’expérience de l’interview 1 an plus tard. Maxime a choisi d’expérimenter à fond les couverts végétaux, et en particulier les couverts relais.

L’un des plus grands défis actuellement est de réussir à produire le couvert en même temps que la culture. Dans la vidéo réalisée cette année, il présente la planche où il a récolté les radis glaçons, qui ont été semés en même temps que le couvert. Cela devrait inspirer certains céréaliers qui cueillent leurs radis pour l’apéro dans leurs couverts biomax.

Radis glaçon semés en même temps qu'un couvert multi-espèces

Seigle + vesce velue... le paillage du futur ?

Sur la partie mécanisée de la production, un peu façon Steve Groff, Maxime a produit des courges sur un épais couvert de seigle. Les courges ont manqué de fertilité et certaines se sont faites manger par les limaces.

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Des résultats de recherche par Steven Mirsky aux USA ont montré que le relarguage d’azote d’un mélange seigle + vesce velue après sa destruction en situation de non-travail du sol est plus lent qu’en situation de travail du sol, ce qui correspond mieux au pic de besoins de la culture en place, fournissant au total environ 100 unités.

Pour valider ces hypothèses, il fera, la prochaine fois, un mélange vesce velue / seigle.

  • Roulage du seigle avant la plantation des courges
  • Rouleau faca sur seigle
  • Strip-till dans le seigle pour ouvrir le sillon
  • Développement des courges dans le seigle roulé au rouleau (...)

Pâturage tournant dynamique pour micro-ferme ?

JPEG - 250.5 ko Au final, la réflexion holistique est la même pour une "grande" et une "micro" ferme : comment produire de la fertilité sur place ?

Maxime est équipé d’un âne et deux moutons, qu’il fait pâturer sur les couverts végétaux à l’automne, encadrés par une clôture mobile.
Le système doit être amélioré, et toutes les idées sont les bienvenues. Ensemble, construisons une vision pour des fermes agroécologiques, qu’elles fassent 0,1 ou 1000 hectares !

Des micro-semoirs et des micro-rouleaux pour les micro-fermes

Maxime est extrêmement enthousiaste à l’idée de faire avancer le schmilblick du maraichage agroécologique, car finalement le web est assez pauvre en vidéos techniques sur le thème des couverts végétaux sur micro-fermes.

A la fin de la vidéo, j’échange avec Maxime sur le projet d’Ecole d’Agroécologie Voyageuse : comment des étudiants peuvent l’aider à progresser dans ses techniques tout en apprenant avec lui ? Voici quelques pistes pour ceux qui voudraient s’impliquer à ses côtés (dans le cadre du projet Les Agron’Hommes ou non) :
> Imaginer un rouleau faca d’un mètre de large
> Imaginer un semoir SD d’un mètre de large
> Venir le filmer régulièrement, pour que peu à peu ce ne soit plus mon travail

Remerciements :

Il m’aura fallu 3 bonnes heures pour écrire cet article (et 5 de plus pour les 2 vidéos), parce que pour moi, partager le superbe travail de Maxime, c’est créer de la fertilité pour les futurs agriculteurs. Si vous avez une grande ferme et que vous voulez installer des jeunes en maraîchage agroécologique, faites moi signe.

Opaline et Maxime, en interview dans la serreJe tiens à remercier :
- Maxime et sa super famille pour son accueil
- Tout l’écosystème de la ferme (y compris l’âne Gérard)
- La caravane des années 70 dans laquelle on dort si bien
- Frédéric Thomas qui m’a proposé de "m’arrêter" chez Maxime sur la route entre la Sologne et la Bretagne
- Ma petite soeur qui m’a refilé les musiques de son vieux jeu vidéo Monstres et Compagnie, que j’utilise librement sur Youtube

Pour toute question ou pour faire part de vos idées à Maxime : opalinelysiak chez gmail.com


9
août
2019

Retrouver l’Inspiration ?

Est-il possible de stopper la désertification des paysages ?
Et quelles méthodes mettre en place pour y arriver ?

Cet article explique comment l’inspiration, les jeunes, une vision globale et l’agriculture régénérative peuvent sauver le monde.

On peut penser que la désertification est encore loin pour nous, dans nos paysages français encore verdoyants.

Personnellement, les années climatiques comme 2018 et 2019, me font penser qu’il faut s’attendre à tout, travailler ensemble avec ouverture d’esprit, en observant et en apprenant des "success stories" des agriculteurs partout dans le monde.

Stopper les déserts en Espagne

Quand Frédéric Thomas m’a envoyé la vidéo "Stopper le désert avec la permaculture" réalisée dans cette région aride d’Espagne, j’étais ravie et j’ai tout de suite fait le lien avec le projet de Commonland, cette organisation hollandaise qui épaule des agriculteurs aux Pays-Bas, en Espagne, en Afrique du Sud et en Australie, à recréer des paysages vivants et résilient.

Dans le cadre de l’Ecole d’Agroécologie Voyageuse du projet Les Agron’Hommes, je travaille avec Commonland pour répliquer le projet en France, et en m’aidant des étudiants partant en stage dans les projets étrangers comme "messagers" qui valoriseront leur expérience dans les paysages français.

Retrouver l’inspiration en Afrique du Sud

Louise, Guillaume et Jacques, étudiants agronomes, sont durant l’été 2019 en Afrique du Sud et développent un projet d’agriculture régénérative et pâturage holistique, avec Living Lands (ou "Paysages Vivants"), une organisation épaulée par Commonland.

La région où ils travaillent est réellement à un stade critique de désertification des sols, avec 230 mm de précipitations par an et moins d’1% de matière organique. Comment mettre en oeuvre des pratiques qui régénèrent les sols ?

Dans cette vidéo, j’interviewais Pieter Kruger, agriculteur-moteur du projet de régénération des paysages :

Cet article, que j’ai rédigé en janvier 2018, décrit le projet du Baviaanskloof dans sa globalité. La vision de Commonland "the 4 returns" est développée sur 10 000 hectares dans 4 pays.

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Commonland a compris que le retour du capital économique, de la Nature et de la santé sociale ne pouvait être possible que si on travaille aussi sur le retour de l’inspiration, ce qui est expliqué dans cette vidéo (vous pouvez mettre la traduction automatique de Youtube pour les non-anglophones) :

Les 3 étudiants qui vivent cette expérience sud-africaine ne sont pas de simples "stagiaires" : ils ont un rôle de catalyseur et de messager.

Ils s’immergent dans un paysage où la situation est critique mais où 10 années de facilitation humaine a permis de souder les agriculteurs pour qu’ils retrouvent de l’inspiration au quotidien. Ils développent leurs talents et apportent une aide précieuse sur place. De retour en France, ils pourront valoriser leur expérience au sein de leur propre territoire.

Dans cet article, Guillaume, étudiant à Bordeaux Sciences Agro, décrit son expérience. Et ici, Louise décrit ce qu’elle vit avec beaucoup de poésie.

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Commonland en France ?

Commonland et Les Agron’Hommes souhaitent collaborer pour développer un projet en France.

Pour le moment, la Bretagne serait le territoire "visé" pour mettre en place la philosophie des "4 retours" et construire la résilience des territoires. Pour cela, nous avons besoin d’agriculteurs qui souhaitent partager leurs problématiques avec des jeunes, et qui n’ont pas peur d’être filmés pour partager, toujours plus. Vous voulez participer ?

>Donnez votre avis ici : https://lesagronhommes.com/impliquez-vous-1